Thursday, September 01, 2011

Feuille de route de la SADC Andry Rajoelina décide d’organiser la cérémonie de signature




Alors que la SADC est restée de marbre devant l’ultimatum du pouvoir HAT qui a expiré ce mercredi 31 août, Andry Rajoelina décide de passer aux actes. La patience a des limites disait-il ce mercredi 31 août devant la presse conviée à Ambohitsorohitra et les 20 millions d’habitants n’en ont que trop souffert ; aussi parce que le pays est souverain et qu’il faut mettre fin à son calvaire en quelque sorte, le pouvoir va organiser la cérémonie de signature de la feuille de route au nom des intérêts supérieurs de la nation. C’est la déclaration ou la décision capitale annoncée à la suite du lancement de l’ultimatum à l’endroit de la SADC. Le président de la HAT n’a pas indiqué de date de la tenue de cette cérémonie qui se veut malgacho-malgache.

Notons que la feuille de route a été proposée par le Dr Simão après consultations des parties malgaches mais sans tenir compte, selon la mouvance Albert Zafy, des propositions qu’elle avait présenté. Cette feuille de route avait été paraphée par des formations politiques malgaches le 9 mars 2011, en l’absence des trois mouvances. Et aussi bien pendant qu’à l’issue de la cérémonie de paraphe, les adhérents à la feuille de route avaient juré qu’ils ne signeront aucune autre feuille de route qui soit modifiée ou amendée. Aujourd’hui donc le pouvoir va procéder à la cérémonie de signature d’une feuille de route mais cependant amendée par le Secrétaire exécutif de la SADC.

À cette feuille de route est opposée par les trois mouvances, ou plus exactement par deux mouvances (mouvances Albert Zafy et mouvance Marc Ravalomanana ; la mouvance Didier Ratsiraka ne s’était pas prononcée à son sujet car l’amiral avait dit qu’il avait au moins trois propositions à présenter au peuple malgache une fois qu’il serait rentré au pays comme il l’avait déjà annoncé aux tenants du pouvoir ; et il attend son retour), la même feuille de route paraphée à Ivato mais amendée par les chefs d’État de la SADC à Sandton en Afrique du Sud. En quelque sorte il y aurait deux feuilles de route, celle de Gaborone et celle de Sandton ou pour parler autrement, celle de Salomão et celle des chefs d’État de la SADC ; la première ne comporte qu’un seul amendement tandis que la seconde en compterait plusieurs, cinq ou six. La principale pomme de discorde réside dans le retour de Marc Ravalomanana et de tous les exilés ou réfugiés politiques dans le pays.

Quoi qu’il en soit, le président de la HAT a présenté les raisons de sa décision de s’en tenir à la feuille de route comme étant un sacrifice car le pays dispose déjà d’une constitution adoptée par référendum au mois de novembre dernier. « Comme la majorité des groupements politiques penchent pour la feuille de route, disait-il, nous allons la mettre en œuvre ». Il lance alors un appel officiel à tous les groupements politiques sans exception pour cette cérémonie de signature de la feuille de route et pour son application stricte dans les plus brefs délais.

Cette cérémonie de signature marquera la fin de toutes ces étapes de dialogue politique, conclut-il car dorénavant il s’agit de préparer sérieusement les élections dont la détermination du type de scrutin à organiser en premier et de la date revient aux formations politiques et à la CENI. Donc, ce n’est pas le président de la HAT qui va décider du scrutin à organiser ; ce n’est pas lui non plus qui fixera la date de son déroulement. Andry Rajoelina, malgré les pleins pouvoirs qui lui avaient été en son temps remis sur un plateau d’argent, ne donne guère l’impression d’exercer ce pouvoir ; il s’en offusque et confie des responsabilités qui lui reviennent à des entités politiques dont les intérêts sont toujours divergents et partisans.


Andry Rajoelina l’a décrété hier : la feuille de route sera bientôt signée, sans l’aval de la Sadc et à une date qui sera fixée par la partie malgache. Une issue que tous ont devinée, depuis l’expiration mardi de l’ultimatum lancé en direction de la Sadc. Mise en scène réussie donc pour le régime de transition. En effet, afin d’activer la signature d’une feuille de route qui lui est favorable et qui ne le contraint pas à un partage du pouvoir, il a monté un plan qu’il a appliqué de A à Z.

En voici les étapes : d’abord, adresser un ultimatum (dont on connaît l’issue) à une Sadc qui hésite à donner une date à la cérémonie de signature. Ensuite, pour préparer l’opinion à une initiative unilatérale, organiser un colloque, dirigé par des groupements de la société civile (Ray aman-dReny Mijoro et Finona) notoirement connus comme étant acquis à la cause du régime. Ceux-ci ont orienté les débats dans le sens d’une signature de la feuille de route sans l’adhésion de la Sadc. Enfin, ayant en main la résolution de ce colloque, s’en servir comme d’un prétexte pour décréter la signature du document.

Bref, cornaqué par le personnel politique médiocre qui l’entoure, Andry Rajoelina poursuit dans la voie de l’unilatéralisme. Le pays est toujours divisé en deux camps rivaux et la sortie de crise ne se profile pas encore à l’horizon. La population n’est pas au bout de ses peines et devrait se préparer à subir encore durablement une crise pénible.

Après la signature de la feuille de route qui va survenir bientôt, il faut s’attendre aux événements suivants dans les prochains jours. En premier lieu, l’augmentation du nombre (déjà pléthorique) des membres du CST et du CT. Ces deux Chambres du Parlement seront élargies avec des éléments des partis déjà gratifiés et d’autres qui sont avides de prendre part au festin. En second lieu, le vote d’une loi d’amnistie au bénéfice des personnalités qui ont rejoint le régime de transition. Les adversaires politiques, comme Marc Ravalomanana, seront écartés des faveurs du régime et ne doivent s’attendre à aucune largesse. En troisième lieu, des élections (dont la nature n’a pas encore été précisée) seront tenues et ne concerneront que le régime et les partis alliés.

Fort probablement, tout ce beau monde va s’entendre pour se repartir les sièges et les circonscriptions grâce à diverses combinaisons. L’objectif étant de quadriller et de contrôler le territoire afin de ne laisser aucune miette à l’opposition. De cette manière, on perdure au pouvoir et on en jouit de tous les avantages, comme cela s’est vu lors des deux années et demie de transition.

Quelle est la différence entre la feuille de route de la Sadc et celle du régime de transition ? La première inclut les mouvances Zafy, Ratsiraka et Ravalomanana et ouvre la voie à une transition concertée. La seconde refuse cette ouverture, n’entend faire aucune concession à l’opposition et ne vise qu’à monopoliser le pouvoir à des fins personnelles. On notera qu’en lançant leurs invitations, les Ray aman-dReny Mijoro et Finona ont cité incidemment les trois mouvances parmi d’autres entités, sans insister outre mesure sur ce point pourtant crucial.

Avant de se lancer dans la signature unilatérale de la feuille de route, Andry Rajoelina n’a pas tendu la main aux opposants et n’a esquissé aucun geste de rapprochement dans leur direction. Dans les vraies démocraties pourtant, avant d’entreprendre une opération qui engage l’avenir de la nation, le chef de l’Etat se concerte avec les principaux chefs de l’opposition. Rien de tel chez nous, ce qui laisse planer un doute sur les convictions démocratiques et les capacités d’homme d’Etat du chef de la transition. Mais aussi sur sa volonté réelle d’implanter le changement au pays…

La signature unilatérale de la feuille de route n’installera pas la paix et la concorde, contrairement à ce qu’a annoncé hier le chef de la transition. Les explosions de grenade par-ci par-là et les rumeurs de coup d’Etat dans l’Armée indiquent que la « sortie de crise » ne sera pas de tout repos. La méthode du régime, fondée sur l’exclusion et non sur la réconciliation, nourrit la rancœur et l’amertume et pourrait de nouveau déboucher sur une tumultueuse conjoncture de violence.

Quelle idée, en tout cas, d’instrumentaliser les Ray aman-dReny Mijoro pour lancer à la cantonade une invitation aux trois mouvances. Au palais d’Ambohitsorohitra, on semble ignorer que le vrai Ray aman-dReny, c’est… Andry Rajoelina.

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