Jean Eugène Voninahitsy, furieux hier à Anosy (Photo Sergio Maryl)
Les partisans du régime se chamaillent. La confusion règne entre ceux qui décident de la voie à suivre pour la sortie de crise au sein des huit groupes politiques ayant paraphé la Feuille de route.
Le flou artistique. Les positions des huit entités ayant paraphé la Feuille de route sont difficiles à cerner, du fait de la lutte intestine au sein de ces formations politiques. Des dirigeants de ces groupes politiques défendent la position de l'Exécutif de la transition et la signature de la Feuille de route, tandis qu'une partie des membres de ceux-ci affirme avoir obtenu des avancées dans les discussions avec les mouvances des trois anciens Présidents.
La salle des séances du Conseil supérieur de la transition (CST) a ressemblé à une cour de recréation d'un établissement scolaire, hier à Anosy. Jean Eugène Voninahitsy, président des « Autres sensibilités », a failli en venir aux mains avec l'un des participants au milieu d'un brouhaha indescriptible. Les tensions qui régnaient dans la salle ont provoqué une altercation entre Jean Eugène Voninahitsy et Olivier Vaovolo. Ce dernier a en effet taxé l’ex-député de Maintirano d’être un politique affairiste devant toutes les personnalités politiques provoquant ainsi la colère de Jean Eugène Voninahitsy. Les deux hommes s’en seraient venus aux mains s’il n’y avait pas l’intervention des autres personnalités participantes à la réunion. M. Voninahitsy ainsi que Victor Manantsoa, Roger Ralison, Alain Andriamiseza, … ont quitté la salle et ils ont promis de revenir ce jour pour continuer leur rapport sur la rencontre qu’ils ont eue avec les trois mouvances.
La scène à Anosy illustre la guerre de représentativité qui fait rage au sein des groupes politiques soutenant le régime. Dans la matinée, des hommes politiques tels Alain Andriamiseza, Adolpe Ramasy ou encore Victor Manantsoa, annoncés comme les émissaires des six entités membres du « Pacte républicain », sans les émissaires du Mouvement pour la démocratie (MDM), affirment avoir trouvé un accord de principe de sortie de crise avec les mouvances des trois anciens Présidents au cours de la deuxième rencontre entre les deux parties.
Dans l'après-midi, une version différente de la situation a été apportée à la suite de la réunion houleuse à Anosy. D'autres acteurs politiques qui affirment également être des représentants des six entités au sein du « Pacte républicain » s'affichent aux côtés des dirigeants de l'Union des démocrates et des républicains pour le changement (UDR-C), qui soutiennent Andry Rajoelina, président de la transition. Ils réclament « à l'unanimité (...) la signature de la Feuille de route avec un seul amendement concernant l'article 20 », selon Ephraïm Randrianasolo, du parti Antoko miombon'ezaka (AME), lisant un procès-verbal de la réunion à Anosy.
Le procès-verbal (PV), signé entre autres par Jean André Ndremanjary, ministre des Sports, annoncé comme étant déjà radié par une partie du HPM dont il est originaire, remet en cause la démarche déjà entreprise auprès des trois mouvances. Ephraïm Randrianasolo indique la possibilité de discussions avec les délégations des anciens chefs d'État, mais « avec une rencontre préalable dont les modalités seront fixées ultérieurement ». Il annonce également une résolution « à l'unanimité pour parler d'une seule voix pendant les négociations », pour encadrer toute autre initiative et épinglant au passage l'initiative vers les Trois mouvances.
La position affichée par l'UDR-C et le TGV, aux côtés des « représentants » des six groupes au sein du « Pacte républicain »" relaye la déclaration d'Andry Rajoelina. Ce dernier a indiqué que « la signature de la Feuille de route aura lieu le 16 septembre selon le programme établi par la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC). Nous ne pouvons plus attendre », en marge d'une cérémonie de remise de dons, hier à Ambohitsorohitra.
Manœuvre et provocation
Les prochains jours devraient permettre de savoir les repositionnements des uns et des autres au sein des huit groupes politiques. Entre-temps, la date de la venue de la mission ministérielle de la Troïka, l'organe chargé de la coopération en matière de politique, de défense et de sécurité, approche à grand pas.
Les signataires du PV de la réunion d'Anosy ne font pas de commentaires sur ce qui s'est passé. Mais Victor Manantsoa, secrétaire général du HPM, évoque une « provocation » derrière la réunion. « D'où notre décision de quitter la salle. Nous savons ce qui va se passer, mais il fallait que nous fassions un rapport de notre démarche et écouter celui du gouvernement », explique-t-il.
Dans la foulée, Jean-Eugène Voninahitsy s'emporte contre une « manœuvre visant à torpiller le processus de rapprochement (avec les mouvances des trois anciens Présidents) ». « Certaines pratiques se perpétuent pour diviser les groupes politiques et entreprendre des démarches parallèles », fustige-t-il. Le membre du CST affirme quand même son intention de « signer la Feuille de route », mais laisse entendre qu'il « n'est nullement sous les ordres de quiconque ».
A priori, les discussions entre les partisans du régime et les mouvances des trois anciens Présidents risquent d'être remises à plat. Hery Rakotobe, de l'Escopol, partie intégrante du « Pacte républicain », tente pourtant de minimiser l'incident à Anosy. « Il s'agit d'une affaire interne des Autres sensibilités » , avance-t-il.
Celui qui est resté dans la salle de réunion ne renie pourtant pas les résultats des démarches entreprises avec les Trois mouvances. « Il s'agit d'une base de discussions. Maintenant, il faut avancer », nuance-t-il, alors que Hery Rasoamaromaka, coordonnateur régional du TGV, considère l'initiative auprès des délégués des trois anciens chefs d'État comme « nulle et non avenue ». « Personne, a fortiori le président Rajoelina, n'a envoyé de délégation là-bas », soutient-il, évoquant des « déclarations mensongères » autour de l'initiative.
Des accords morts-nés
Les délégués des mouvances des trois anciens Présidents et des membres des groupes des entités au sein du « Pacte républicain », sans les représentants du Mouvement pour la démocratie (MDM), ont scellé un accord minimal, hier à Analamahitsy.
Plusieurs points sont prévus par le texte signé par les représentants des deux parties au cours de la deuxième rencontre. Il s'agit, entre autres, du début de la transition après la signature de la Feuille de route, l'octroi du Premier ministre aux mouvances des trois anciens Présidents, le retour de l'ancien président Didier Ratsiraka avec tous ses droits ou encore la restructuration de la Commission électorale nationale indépendante (CENI). Les participants n'ont pas trouvé un accord sur le cas de l'ancien président Marc Ravalomanana sauf « l'acceptation de son retour ».
Mais la réunion entre les huit groupes politiques ayant paraphé la Feuille de route remet déjà en cause la démarche débouchant sur cet accord minimal. Curieusement, la rencontre entre les délégations des deux parties avait été annoncée la semaine dernière et l'état d'avancement des discussions avait filtré dès samedi sans que personne ne soulève sa légitimité, du moins jusqu'à hier.
« Nous allons adresser une lettre à l'UDR-C et au TGV pour savoir leurs intentions », lâche Mamy Rakotoarivelo, chef de délégation de la mouvance Ravalomanana.
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