Beaucoup de naïveté chez certains tenants du pouvoir qui estiment que la troïka de la Sadc, dont les premiers émissaires débarqueront demain dans l’île, va entériner la signature de la feuille de route. L’évènement, rappelons-le, est programmé pour le 16 septembre dans l’après-midi, par le régime de transition. Impressionnée par la ferme détermination de l’exécutif malgache, pense-t-on, la Sadc se ralliera à l’initiative du 16 septembre et cautionnera l’opération.
C’est mal connaître l’entité d’Afrique Australe. Celle-ci ne fera rien d’autre que ce qu’elle a fait depuis plus de deux ans déjà : attendre que les quatre mouvances s’entendent sur un processus de sortie de crise avant de donner son aval. Rappelons que la troïka a pris pour la première fois en main le dossier malgache le 31 mars dernier à Livingstone (Zambie). On s’attendait à une décision franche, concernant notamment la feuille de route adoptée et signée à Ivato par les parties malgaches trois semaines auparavant. Il n’y eut rien de tel, la troïka s’étant contentée d’une vague exhortation au consensus et à l’inclusivité.
Beaucoup de commentaires en tout cas sur l’attitude de la Sadc faite surtout d’hésitation et de tergiversation. On dit surtout que l’entité, sous l’impulsion du Sud-Africain Jacob Zuma est résolument favorable à Marc Ravalomanana et ne veut faire aucun cadeau au régime de transition. C’est la raison pour laquelle, dit-on, elle ajourne d’un sommet à l’autre la signature de la feuille de route. En fait, on notera une grande constance dans la position de la Sadc : à Madagascar, les mouvances rivales doivent s’entendre sur la sortie de crise, et entrer ensemble dans les institutions de la transition. Dans son esprit en effet, si les mouvances rivales prennent en charge collégialement l’organisation des élections, c’est là un gage de neutralité et de crédibilité pour les scrutins de sortie de crise. La devise de la Sadc est donc celle-ci : consensus d’abord, signature après.
Si la Sadc se montre ferme dans sa position et ne dévie pas de la ligne qu’elle s’est tracée, c’est aussi car elle est soutenue en cela par la communauté internationale. L’Union européenne tient par exemple le même discours sur la con-sensualité, comme on le constate dans la résolution du Parlement européen de juin dernier. Cette instance appelle « à la mise en place d’un gouvernement neutre, consensuel et pluraliste qui aura en charge le lancement d’un processus électoral transparent et indépendant ». Consciente de la responsabilité particulière qui lui incombe, la Sadc mène la médiation avec une rigueur sans faille. Elle ne se laisse pas berner par un régime de transition qui, pour faire croire qu’il a la majorité derrière lui, a pulvérisé les quatre mouvances et morcelé la classe politique. Cautionner une feuille de route non signée par les trois mouvances, cela ferait le jeu de ce que l’Union Européenne appelle « un régime illégal qui monopolise les pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire ».
Pas de signature appuyée par la communauté internationale donc sans la participation des trois mouvances. On encouragera les initiatives actuelles qui visent à installer autour d’une table les mouvances rivales et à tenter de les amener sur un terrain d’entente. En premier lieu, on saluera la rencontre qui réunit des éléments des trois mouvances et des émissaires des auteurs du pacte républicain. En second lieu, on adressera aussi un coup de chapeau au parti Monima qui invite à une table ronde toutes les forces politiques malgaches.
Voilà des citoyens responsables qui ont au plus haut point le sens du devoir, et qui agissent dans un sens favorable à une véritable sortie de crise. Leur attitude tranche avec celle du régime de transition dont la cérémonie de signature du 16 septembre n’est qu’un forcing qui pourrait coûter cher au pays. Il est vrai que sous leur discours faussement soucieux de l’ « intérêt supérieur de la nation », les barons du régime ont surtout en vue la conservation du pouvoir afin d’en jouir de tous les avantages.
Le 16 septembre, si les tenants du pouvoir et leurs alliés apposent leurs signatures, la Sadc et la communauté internationale pourraient sortir leurs …griffes.
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