Sunday, February 09, 2014

Subir le racisme provoque-t-il un vieillissement précoce ?


C'est une étude parue en janvier qui pose une question nouvelle, à laquelle on n'aurait pas pensé spontanément et qui prend un écho particulier dans la France de ce début 2014, où la haine de l'autre fait une réapparition aussi spectaculaire que nauséabonde. La question, qui donne son titre à ce billet, est la suivante : subir le racisme provoque-t-il un vieillissement précoce ? La discrimination et les actes racistes ont-ils un impact biologique mesurable chez ceux qui en sont victimes ?Parue dans l'American Journal of Preventive Medicine, cette étude américaine ne prétend pas apporter une réponse définitive mais seulement lancer le débat avec un premier jeu de résultats. Si je m'y arrête aujourd'hui, c'est pour son approche originale et transdisciplinaire et aussi parce qu'elle est co-signée par le Prix Nobel de médecine 2009, Elizabeth Blackburn, qui n'a pas spécialement pour habitude de donner dans l'incongru et le frivole.
Les auteurs de ce travail sont partis du constat que, aux Etats-Unis, les hommes d'origine africaine constituent la population la plus durement frappée par les maladies graves et notamment celles liées à l'âge, qui apparaissent en général plus tôt chez eux. Leur espérance de vie s'en ressent d'ailleurs énormément : 69,7 ans pour les hommes noirs contre 75,7 années pour leurs homologues blancs. D'ordinaire, cette importante différence est mise sur les compte des inégalités sociales (niveau de vie, alimentation, accès aux soins, etc.). Cependant, depuis quelques années plusieurs études s'interrogent sur le lien pouvant exister entre, d'un côté, ces données sanitaires et démographiques et, de l'autre, le stress psychosocial qu'engendrent les actes racistes. Si cette hypothèse est correcte, se sont demandé les chercheurs, comment peut-elle se transcrire au niveau biologique ?
Pour répondre à la question, ils ont eu l'idée de s'intéresser au domaine de prédilection d'Elizabeth Blackburn : les télomères. Comme on peut le voir sur l'illustration qui ouvre ce billet, les télomères sont des séquences d'ADN situées à l'extrémité des chromosomes et qui forment une espèce de capuchon protecteur. En effet, chez les eucaryotes (animaux, végétaux, champignons et protistes), lorsque les cellules se divisent et se dupliquent, la copie des chromosomes est incomplète : les toutes dernières séquences d'ADN, celles qui se situent tout au bout des chromosomes sont perdues au cours de l'opération. D'où la nécessité d'avoir à cet endroit une espèce de "marge d'usure". Les télomères ont donc à la fois pour rôle de signaler qu'on arrive au bout du chromosome et d'éviter que des informations génétiques indispensables soient perdues lors de sa duplication. Chaque année, au fil de nos divisions cellulaires, nous perdons ainsi un peu de nos télomères. On retrouve cette érosion chromosomique associée à certaines maladies cardiovasculaires, à l'arthrose ou à la maladie d'Alzheimer.
Les chercheurs ont donc décidé de se servir du raccourcissement des télomères comme d'un marqueur du vieillissement chez 92 Afro-Américains âgés de 30 à 50 ans, en bonne santé et issus de milieux divers, à qui l'on a prélevé quelques gouttes de sang. En parallèle à ces analyses, deux tests ont été menés pour évaluer, si l'on peut se permettre l'expression, l'exposition de ces personnes au racisme. Un questionnaire s'intéressait aux discriminations subies dans la vie quotidienne, que ce soit pour décrocher un emploi ou un prêt bancaire, louer un logement, avoir accès aux soins médicaux. Des questions concernaient aussi la manière dont les participants à l'expérience se sentaient traités à leur travail, dans les magasins, dans les restaurants, par la police ou la justice. Un second test était pratiqué pour évaluer les biais personnels inconscients vis-à-vis des groupes ethniques. Il consiste à mesurer la vitesse à laquelle les sujets associent des images de personnes (blanches ou noires de peau) à des mots dotés de connotations positives ou péjoratives. Il est ainsi établi que 70 % des Américains ont des préjugés contre les Noirs... préjugés que la moitié des Afro-Américains eux-mêmes partagent.
L'expérience a mis en évidence un effet, modeste mais significatif, une corrélation entre raccourcissement des télomères et "exposition" au racisme. Mais ce lien est uniquement présent chez les personnes qui tiennent en mauvaise estime leur groupe ethnique. Ainsi que l'explique le premier auteur de l'étude, David Chae (université du Maryland), "les hommes afro-américains qui ont une vision positive de leur groupe ethnique pourraient être protégés de l'impact négatif de la discrimination raciale. En revanche, ceux qui ont intériorisé un biais anti-Noirs pourraient être moins aptes à gérer les expériences racistes, ce qui pourrait engendrer du stress et des télomères plus courts."
On notera que David Chae utilise le conditionnel. Dans la conclusion de leur étude, les auteurs restent très prudents sur la portée de leurs résultats en soulignant la taille restreinte de leur échantillon. Il faudrait selon eux renouveler l'expérience sur une cohorte plus importante, suivie dans le temps. Il faudrait aussi plus de connaissances sur la taille de départ des télomères des différentes populations et sur la vitesse moyenne à laquelle ils s'usent car les données sont contradictoires à ce sujet. Néanmoins, ils insistent sur le fait que ce travail est un point de départ, une voie de recherche qui s'ouvre, mêlant sociologie, médecine et génétique. Dans leur article, les chercheurs utilisent, à propos de l'effet des discriminations, l'expression de "toxines sociales". Une manière de dire que si le racisme est un poison au sens figuré, il pourrait aussi en être un au sens propre.
Pierre Barthélémy du journal Le Monde

Sunday, January 12, 2014

Les Américains auraient testé des armes biologiques au Japon



La base américaine de Futenma sur l'île d'Okinawa au Japon, en août 2012.

L'armée américaine aurait testé des armes biologiques « au moins une douzaine de fois » au début des années 1960 dans la préfecture japonaise d'Okinawa, occupée par les Etats-Unis depuis la seconde guerre mondiale jusqu'en 1972. C'est ce que rapporte le Japan Times, qui s'appuie sur des documents des autorités américaines obtenus par l'agence de presse japonaise Kyodo News.


Un champignon dévastateur qui provoque des lésions sur les plants – leMagnaporthe grisea, donnant la maladie de la pyriculariose – aurait ainsi été diffusé sur les rizières pour évaluer son impact sur la production de cette denrée alimentaire de base. « On estime que ce champignon, dont l'existence est connue dans 85 pays, détruit une quantité de riz qui pourrait nourrir 60 millions de personnes par an », note le quotidien anglophone. Selon lui, étaient alors visés dans le collimateur de l'armée américaine la Chine et l'Asie du Sud-Est.
Le gouvernement américain a déjà dévoilé des programmes d'expérimentation d'armes chimiques et biologiques à Puerto Rico, Hawaï et dans l'Utah, avance aussi le Japan Times. Washington décida de mettre un terme à l'utilisation d'armes biologiques en 1969, avant qu'une convention internationale ne vienne lesinterdire en 1975.

STOCKAGE DE DÉFOLIANTS
Il a également « été rapporté que l'armée américaine stockait des défoliants à Okinawa pendant la guerre du Vietnam », rapporte encore le journal. Les défoliants sont une substance chimique utilisée en agriculture pour faire tomber les feuilles d'un végétal, mais également employée en tant qu'arme chimique, comme l'agent orange, produit par Dow chemical et Monsanto, et massivement déversé par les Etats-Unis sur le Vietnam dans les années 1960.

Des barils de défoliants ont ainsi été déterrés sur un site appartenant jusqu'en 1987 à l'importante base aérienne américaine de Kadena, en pleine ville d'Okinawa. L'armée a toujours nié avoir stocké des défoliants, et notamment de l'agent orange, à Okinawa. Mais, note le Japan Times, « les conclusions de la communauté scientifique japonaise et internationale sont sans équivoque : non seulement ces barils contredisent les démentis du Pentagone sur la présence de défoliants militaires au Japon, mais en plus, la terre polluée menace la santé des habitants, nécessitant une solution d'urgence. »

DÉMÉNAGEMENT D'UNE BASE AMÉRICAINE
Le dossier des bases américaines d'Okinawa perturbe les relations américano-nippones depuis des années, et notamment celle de Futenma, actuellement située en pleine ville de Ginowan, au sud d'Okinawa – une zone de forte concentration urbaine où ces installations sont très critiquées. Fin décembre, le gouverneur d'Okinawa a donné son feu vert au déplacement de cette base militaire, en signant une autorisation pour la création de terrains artificiels en bordure du littoral oriental de l'île, qui serviront à son transfert.
Le projet de déménagement de la base de Futenma est sur la table depuis un premier accord américano-japonais en 1996, mais ce dossier est confronté depuis le début à la méfiance d'une frange importante de la population d'Okinawa, où sont basés la moitié des quelque 47 000 soldats américains présents au Japon. Lassés des nuisances et de l'insécurité engendrées par cette présence militaire massive sur leur territoire, les opposants au projet demandent que cette base, au lieu d'être déménagée dans un autre lieu de l'île, quitte définitivement Okinawa.

Source  Le Monde

Tuesday, January 07, 2014

Espagne : la fille du roi inculpée de fraude fiscale




Au lendemain du 76e anniversaire du roi Juan Carlos, la monarchie espagnole est ébranlée par l'inculpation de sa fille cadette, l'infante Cristina, pour fraude fiscale et blanchiment de capitaux. La justice espagnole l'a convoquée pour le 8 mars.


C'est la première fois qu'un membre direct de la famille royale est touché par l'enquête pour corruption qui vise Iñaki Urdangarin, l'époux de Cristina, écornant sévèrement l'image de la monarchie. Depuis trois ans, la popularité de Juan Carlos n'a cessé de chuter, en grande partie sous l'effet de cette enquête visant son gendre.
Le juge José Castro, du tribunal de Palma de Majorque, aux Baléares, qui enquête depuis 2010 sur cette affaire, est passé outre à l'opposition du parquet pourinculper Cristina, âgée de 48 ans, pour « délits fiscaux présumés et blanchiment de capitaux ». Au printemps 2012, le juge avait mis en examen une première fois l'infante, à l'époque pour trafic d'influence, mais cette décision avait été annulée à la suite d'un recours du parquet.

Le juge cherche à établir si la fille du roi a des liens avec les activités frauduleuses présumées de son époux. Ce dernier, un ancien champion olympique de handballreconverti en homme d'affaires, âgé de 45 ans, est soupçonné d'avoir détourné 6,1 millions d'euros d'argent public avec son ancien associé, Diego Torres, alors qu'il présidait, entre 2004 et 2006, une société à but non lucratif, l'institut Noos.

UNE MAJORITÉ D'ESPAGNOLS VEULENT QUE LE ROI ABDIQUE
Selon un sondage publié dimanche par El Mundo, 62 % des Espagnols souhaitent que le roi abdique et à peine un sur deux soutient désormais la monarchie, mais une large majorité est favorable, en revanche, au prince héritier Felipe.
Au printemps 2012, le roi avait adressé aux Espagnols des excuses publiques alors qu'il venait d'être hospitalisé après une chute lors d'une partie de chasse à l'éléphant au Botswana, un coûteux voyage qui avait choqué le pays, plongé dans la crise. Le roi, né le 5 janvier 1938, a également souffert depuis 2010 de multiples ennuis de santé qui ont contribué à soulever des interrogations dans le pays sur l'avenir de son règne. Il est apparu lundi lors d'une cérémonie militaire visiblement fatigué et appuyé sur des béquilles. Il s'agissait de sa première apparition en public depuis une opération de la hanche, le 21 novembre.
Juan Carlos bénéficiait auparavant d'une large popularité auprès des Espagnols, reconnu comme le souverain qui a œuvré pour la transition démocratique après la fin de la dictature franquiste. Désigné comme son successeur par Francisco Franco, il était monté sur le trône le 22 novembre 1975, deux jours après la mort du dictateur.

Source Le Monde

Saturday, January 04, 2014

Froid polaire aux Etats-Unis : le pire est à venir



La ville de New York se préparait à affronter vendredi soir des températures de – 13 °C, – 23 °C en ressenti en raison des vents forts attendus avec la tempête.
La ville de New York se préparait à affronter vendredi soir des températures de – 13 °C, – 23 °C en ressenti en raison des vents forts attendus avec la tempête. | AFP/DON EMMERT

Dans la foulée de la tempête de neige qui a paralysé le nord-est des Etats-Unis pendant plusieurs heures vendredi, les températures sont en train tomber à des niveaux record dans toute la région. Les chutes de neige et le froid quasi polaire, avec pas plus de - 18°C à New York vendredi, ont déjà fait 11 morts aux Etats-Unis depuis le début de la nouvelle année, dont quatre rien que vendredi, et perturbé les transports aériens. Ensevelie sous la neige, New York tourne toujours au ralenti, et la vague de froid touche tout l'est du pays, ainsi que l'est du Canada.


Les prévisions météorologiques laissent pourtant penser que le pire est à venir : dans les Etats du centre et du nord du pays, les températures ressenties pourraient descendre jusqu'à - 51 °C – une température à laquelle la peau peutgeler en cinq minutes, comme le rappelent les services météorologiques.
Chicago pourrait battre lundi son record de température la plus basse enregistrée en journée : les -24°C enregistrés le 18 janvier 1994 et le 24 décembre 1983. Dans le Minnesota (nord), le gouverneur Mark Dayton a d'ores et déjà annoncé que les écoles publiques seraient fermées lundi : « J'ai pris cette décision pourprotéger tous nos enfants des températures dangereusement froides qui sont prévues », a-t-il expliqué. Dans le Wisconsin voisin, le match de football américainopposant dimanche les Green Bay Packers aux 49ers de San Francisco pourrait lui aussi battre le record du match le plus froid de l'histoire de la ligue américaine.

UN FROID HISTORIQUE AU QUÉBEC
A Philadelphie (Pennsylvanie), un employé a été écrasé par une pile de sel de 30 mètres sur laquelle il travaillait et qui s'est effondrée. Dans l'Etat de New York, une femme de 71 ans souffrant de la maladie d'Alzheimer est morte de froid après êtresortie de chez elle. Deux autres personnes ont été tuées dans des accidents de la route dans le nord-est du pays, mais sept autres décès ont été attribués au froid dans plusieurs Etats du Midwest.
Au Canada, un froid glacial s'est abattu sur toutes les régions de la moitié Est. À Québec, le thermomètre affichait -29 degrés vendredi, après un record de -33,9 jeudi. Il fallait remonter à 1968 pour retrouver des froids aussi polaires. Le mercure a chuté à -44 degrés à Parent, à 400 km au nord de Montréal.

La première tempête de neige de l'année a fortement perturbé les transports aux Etats-Unis.

Depuis vendredi à la mi-journée, de fortes chutes de neige se sont abattues sur les provinces atlantiques, avec 30 cm de poudreuse en Nouvelle-Écosse et à Terre-Neuve. La météo canadienne prévoit encore des averses de neige dans les prochains jours.

VOLS ANNULÉS, ÉCOLES FERMÉES
A New York, près de 1 000 vols ont été annulés, des centaines d'autres retardés de, ou vers, les trois aéroports de Newark, La Guardia et JFK. L'aéroportinternational JFK, fermé pendant trois heures, a rouvert progressivement, alors que le soleil revenait sur la ville. A Boston plus de 190 vols ont été annulés, et près de 500 l'ont été de, ou vers, Philadelphie, où 22 cm de neige étaient tombés durant la nuit. Au total, quelque 5 000 vols ont été annulés depuis jeudi aux Etats-Unis, dont 1 650 rien que pour New York. Les écoliers, collégiens et lycéens de la région ont par ailleurs été priés de rester chez eux vendredi. 

Un SDF déneige un bout de trottoir à New York, vendredi 3 janvier.

La température a chuté très bas, à -18°C dans la « Grosse Pomme » vendredi soir, et le nouveau maire démocrate, Bill de Blasio, a recommandé aux New-Yorkais de rester chez eux. L'ONU, dont le siège se trouve à New York, avait suspendu ses activités pour la journée. Le métro fonctionnait, avec des retards, et certains trains circulaient sur un rythme de week-end.

La tempête de neige, nommée Hercules par les services météo, constituait un premier test pour Bill de Blasio, qui a pris ses fonctions mercredi. Le responsable des services de la voirie de New York, John Doherty, a déclaré qu'en dépit des 1 700 chasse-neige mobilisés, les New-Yorkais ne devaient pas s'attendre à revoirimmédiatement le revêtement des rues, le froid rendant le sel inefficace. Et vendredi soir, avec le froid mordant, les trottoirs étaient devenus particulièrement glissants.
Un record de neige a par ailleurs été enregistré à Boxford, au nord de Boston, où il est tombé 61 cm de neige, et où la température devait descendre à -20°C vendredi soir. Cette chute des températures affecte tout le Nord-Est.

New York sous la neige pendant le gros de la tempête, jeudi 2 décembre.


Source  Journal Le Monde