François Fillon a entrouvert la porte jeudi à un nouveau recul de l’âge de la retraite au nom de la "convergence sociale" entre la France et l’Allemagne, où se profile un départ à 67 ans à l’horizon 2030, s’attirant une volée de bois vert de la part de syndicats. Lors de la remise d’un prix jeudi à Matignon, le Premier ministre est sorti de son discours pour se livrer à un plaidoyer en faveur des convergences fiscale et sociale entre Paris et Berlin.
"Il faudra aller vers un temps de travail commun, il faudra aller vers un âge de retraite commun, il faudra aller vers une convergence progressive de l’organisation économique et sociale de nos deux pays, car c’est la clef de la survie et du développement de la zone euro et du continent européen", a prévenu M. Fillon.
L’âge de la retraite en Allemagne va passer graduellement de 65 à 67 ans, en vertu d’une réforme votée en 2007 et destinée à éviter l’écroulement d’un système mis à mal par une espérance de vie toujours plus longue et un rétrécissement de la population active.
Le recul de l’âge de la retraite se fera toutefois très progressivement, pour atteindre effectivement 67 ans aux alentours de 2030. La réforme française des retraites, entrée en vigueur en juin 2011, prévoit pour sa part un recul de 60 à 62 ans de l’âge légal de cessation d’activité.
La France doit ainsi "se mettre au niveau de son partenaire, tant en terme de compétitivité, qu’en terme de maîtrise budgétaire", a souligné le chef du gouvernement, ajoutant que la "cible" d’un déficit à 3% du PIB en 2013 n’était "pas négociable". A lui seul, le déficit de la branche vieillesse de la Sécurité sociale devrait atteindre 5,8 milliards d’euros en 2012. L’entourage du Premier ministre a toutefois tempéré ces déclarations en rappelant que "la récente réforme des retraites est un élément de la convergence sociale et (que) le gouvernement n’envisage pas d’aller au-delà dans les prochains mois".
"La convergence franco-allemande est un objectif général nécessaire pour maintenir la compétitivité de la France", fait également valoir l’entourage de M. Fillon, qui se pose depuis 2007 en défenseur de la discipline budgétaire et brocarde régulièrement la promesse socialiste d’un retour à 60 ans de l’âge légal de départ en retraite. Cette déclaration inattendue de M. Fillon, trois mois après l’entrée en vigueur de la réforme menée par l’ancien ministre du Travail Eric Woerth, a désagréablement surpris chez les syndicats.
"C’est illusoire de vouloir copier l’Allemagne. On s’opposera bien entendu à toute velléité d’augmenter de nouveau l’âge de départ en retraite ou d’augmenter la durée de cotisation", menace Eric Aubin (CGT). "C’est une déclaration très inopportune et provocatrice, on sort d’une réforme et on veut en rajouter une couche", déplore à la CFDT Jean-Louis Malys.
Evoquant un "ballon d’essai", Philippe Pihet (FO), prévient que "si on va dans ce sens, il faut tout rediscuter (...) On ne peut pas avoir une protection sociale self-service en prenant les options européennes qui tirent vers le bas", a-t-il mis en garde. Pour Pascale Cotton (CFTC), "l’annonce du Premier ministre est très mal venue : les salariés sont déjà anxieux, les conditions de travail ne sont pas bonnes, le moral est bas".
Les candidates à la primaire socialiste, Martine Aubry et Ségolène Royal, ne sont pas en reste. "Cette obsession à s’aligner sur le bas au lieu de s’aligner sur le haut, c’est un vrai problème et ça ne peut qu’aggraver la situation de la France", regrette Mme Royal. Mme Aubry accuse quant à elle M. Fillon d’avoir "un problème avec la réalité des chiffres".
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