Le Monde.fr | Par Simon Piel
Le parquet de Paris a ouvert une information judiciaire, le 27 juin, pour "faux","escroquerie" et "blanchiment" qui a été confiée aux juges d'instruction René Cros et Roger Le Loire. Les magistrats du pôle financier s'intéressent notamment à différents flux financiers autour de Thomas Fabius, le fils aîné de l'actuel ministre des affaires étrangères.
On ignore pour l'instant avec précision les faits qui pourraient être reprochés à Thomas Fabius. Une plainte, déposée en octobre 2011, avait donné lieu en mai 2012, à l'ouverture d'une enquête préliminaire. S'en était suivis deux signalements Tracfin, dont l'un portait sur les mouvements d'argent ayant précédé l'acquisition d'un appartement.
Après le patrimoine des ministres, celui de leurs enfants. Selon Le Point, Thomas Fabius a acheté, en juin 2012, l'appartement de l'ancien réalisateur Claude Zidi. Asavoir un 280 mètres carrés à Paris pour la modique somme de sept millions d'euros.
L'hebdomadaire s'interroge sur la façon dont le fils du ministre des affaires étrangères a pu acquérir un tel bien immobilier, alors qu'il n'est pas soumis à l'impôt sur la fortune.
Le parquet de Paris s'intéresse également aux conditions d'achat du bien immobilier par Thomas Fabius, qui a expliqué au Point avoir contracté un emprunt bancaire "assorti d'une mystérieuse garantie". D'autres sources évoquent quant à elles des gains de jeu. Selon le journal, il ne ferait l'objet d'aucune enquête fiscale, malgré un signalement de la cellule gouvernementale de lutte antiblanchiment Tracfin.
Le fils du ministre le plus riche du gouvernement avait déjà embarrassé son père en 2011, alors qu'il avait été condamné à 15 000 euros d'amende, dont 10 000 euros avec sursis, pour abus de confiance par le tribunal correctionnel de Paris, dans le cadre d'une procédure de "plaider-coupable".
ORIGINE DE FONDS
Lors de cette curieuse opération immobilière, révélée par Le Point, Thomas Fabius avait acheté en 2012 un appartement dans le 7e arrondissement à Paris, pour plus de 7 millions d'euros. Les enquêteurs de l'Office central de répression de la grande délinquance financière (OCRGDF) s'interrogent notamment sur l'origine des fonds qui lui ont permis de réaliser cette opération alors que, selon Le Point, il n'est pas imposable.
Contacté, son avocat, Cyril Bonan a tenu à préciser que "si une information judiciaire a bien été ouverte, elle permettra de mettre un terme sur les spéculations autour de cet appartement" ajoutant que son client "qui n'a pas été entendu dans le cadre de l'enquête préliminaire se tient à disposition de la justice".
Dans un communiqué du 4 juillet, Me Bonan expliquait que l'acquisition s'était faite"dans des conditions normales" :
"Elle a été financée pour partie par un apport personnel de M. Thomas Fabius et pour partie par un emprunt bancaire, lequel est assorti de garanties usuelles, en l'occurrence une hypothèque sur le bien immobilier, ainsi qu'un contrat d'assurance-vie souscrit par Thomas Fabius et donné en gage à la banque".
Les investigations portent toutefois sur des faits plus larges. Une demande d'entraide pénale avait notamment été faite au Maroc dans le cadre de l'enquête préliminaire.
Thomas Fabius porte des costumes de prix et un nom qui lui a longtemps ouvert les portes. Deux procédures judiciaires ont terni sa réputation et son comportement de flambeur lui a valu d'être interdit de casino. Mais il n'a pas totalement perdu son entregent. Comment aurait-il pu, sinon, acheter un appartement de 280 m2 au cœur de Paris pour quelque 7 millions d'euros, comme l'a révélé Le Point, lui qui ne paye pas d'impôt sur le revenu, et sans que l'administration fiscale ne cherche à en savoir plus ?
En 2004, alors qu'il venait de fonder à 23 ans sa première société, "People and Baby", Thomas Fabius assurait à L'Express : "Mon nom est un avantage comparatif. D'abord, il suscite la curiosité de mes clients potentiels et m'ouvre des portes. C'est le bon côté du statut d''enfant de'. Si vous faites quelque chose de votre vie et si vous n'êtes pas totalement antipathique, on parle de vous." Il avait cependant ajouté un codicille : "Le mauvais côté, c'est que je resterai un 'fils de' tant que je ne me serai pas forgé ma propre légitimité."
Depuis, ce statut lui a valu une publicité bruyante à chacun de ses faux pas. Et a obligé son père à prendre ses distances avec son aîné. Après la révélation des curieuses conditions d 'achat de cet appartement, dont la valeur excède d'un million le patrimoine que le ministre des affaires étrangères a déclaré, le parquet de Paris a ordonné une enquête préliminaire et Laurent Fabius a dû se justifier. Le ministre a assuré au Monde qu'il n'avait "contribué en aucune façon à l'acquisition de cet appartement". Ni en offrant sa garantie à la banque qui aurait accordé un prêt. Ni par une donation tirée de la fortune familiale constituée par quatre générations de marchands d'art.
Simon Piel du Journal Le Monde
No comments:
Post a Comment