Monday, July 29, 2013

Entreprises, marques : changer de nom pour changer d'image ?

Oubliez le Crédit lyonnais, Spanghero. Souvenez-vous plutôt de LCL et de La Lauragaise. Deux marques dont les noms et appellations ont changé, pour faireoublier un passé problématique. Et pour cause, elles ont respectivement été mêlées à des affaires et des scandales alimentaires. Pour se refaire une virginité, elles ont adopté la stratégie de dernier recours : le changement de nom. Une manœuvre appelée rebranding, en référence au branding, stratégie de marketing gérant l'image de marque. 

Exemple emblématique et cas d'école pour les cabinets de communication : le Crédit lyonnais. En 2005, la plus vieille banque de France, née en 1863, change d'identité pour devenir la LCL. La banque indiquait alors que la LCL était "le Crédit lyonnais en plus court, plus moderne, plus dynamique, plus efficace et plus rapide". Et surtout moins associée au scandale financier de l'affaire Tapie.


Un nouveau nom pour tourner la page des années noires, celles des décennies 1990 et 2000, qui voient la banque s'empêtrer dans l'affaire qui finit par prendreson nom, concernant l'arbitrage entre la banque et l'homme d'affaires Bernard Tapie. Ce scandale financier, qui continue de faire les gros titres de l'actualité, a coûté à l'Etat 403 millions d'euros, et au Crédit lyonnais sa réputation. Le nom de la banque, constamment cité dans la presse, devient associé à l'un des plus gros scandales financiers français.

En 2005, Georges Pauget, directeur général du groupe, décide donc de revoirtoute l'identité de la banque, du logo au slogan, en passant par le nom. Une opération couronnée de succès. Car si le litige fait toujours la "une" de la presse, les médias évoquent l'affaire du Crédit lyonnais. L'image de marque de la LCL est épargnée.

MAUVAISE RÉPUTATION

Même calcul pour Spanghero, qui vient de devenir La Lauragaise pour faire oublier son implication dans le scandale de la viande de cheval. Une fraude alimentaire révélée en février dernier, qui avait provoqué une polémique sur l'étiquetage et le manque de contrôle de l'industrie agroalimentaire. 
Discréditée, l'entreprise avait été placée en liquidation judiciaire et était menacée de fermeture. C'est donc sous une autre identité que la société a décidé de rouvrirses portes ce lundi. "La marque est un actif immatériel. Dans le cas de Spanghero, elle a clairement été salie, elle est devenue un actif négatif pour les repreneurs de l'entreprise. Or, une marque se mesure et se chiffre par un classement financier, elle est évaluée par des commissaires aux comptes", explique Jacky Isabello, directeur associé du cabinet de communication Wellcom.

Un changement très coûteux, qui peut se chiffrer à plusieurs centaines de milliers d'euros. Changements administratifs et renouvellement logistique, protection juridique : les dépenses sont multiples. A ces frais s'ajoutent en général des sommes faramineuses de communication, dépensées dans l'élaboration d'un nouveau logo, d'une nouvelle charte graphique et d'études marketing.

"LORSQU'ON PARLE DES SUICIDES, ON PARLE DE FRANCE TÉLÉCOM"

En France, l'opération de rebranding la plus onéreuse revient à France Télécom pour son passage à la marque Orange. Un côut estimé en 2007 à 220 millions d'euros. Président du cabinet de communication "Comcrise", Laurent Vibertévoque cette stratégie :
"Dans ce cas, on rompt avec le système d'Etat pour organiser le passage au privé. Le terme France disparaît, et tout ce qui est mauvais est attribué à l'appellation passée. Lorsqu'on évoque les suicides, on parle de France Télécom. Mais quand on fait référence aux innovations techniques, on évoque la marque Orange. Comme pour le Crédit lyonnais et LCL, on veut faireoublier le passé grâce au rebranding. Pour que l'opération fonctionne, cela peut parfois prendre des décennies."
Si cette stratégie est surtout utilisée en période de crise, certaines entreprisessont contraintes d'y avoir recours en cas de litiges judiciaires. C'est ce qui est arrivé à Danone, en 2005 qui a dû changer l'appellation de ses yaourts Bio pour Activia. Le géant de l'alimentaire n'avait pas d'autre choix : une directive européenne datant du début des années 90 interdit de vendre des denrées alimentaires sous des termes évoquant l'agriculture biologique sans recourir à ces modes précis de production.
La marque a donc dû dépenser des sommes astronomiques d'espaces publicitaires pour ne pas perturber le client. Car si les raisons du rebranding diffèrent, l'objectif reste le même : ne pas perdre de vue le consommateur.

Source Journal Le Monde

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