Nos confrères de la Gazette de la Grande Ile ont titré à la une : « Politiciens malgaches : Les plus impopulaires ... au monde ! ». Le contraire nous aurait bien étonné deux ans et demi après le déclenchement d’une crise politique qui continue à se poursuivre sans que la classe politique ne semble particulièrement s’en émouvoir et se décide à agir en conséquence.
Il faut cependant avouer que le titre de nos confrères est un peu sensationnaliste. Si l’on vérifie à la source des données qu’ils citent, le rapport du World Economic Forum sur la compétitivité mondiale, on se rend compte qu’il n’est pas rigoureusement prouvé que les politiciens locaux sont vraiment les plus impopulaires de la planète. À la question « Comment noteriez vous le niveau de confiance du public envers les normes éthiques des politiciens de votre pays ? (note 1 = très faible ; note 7= très forte) », la moyenne des réponses est de 1,6. Ce qui place Madagascar à la 135è place ... sur 139. Donc pas tout à fait au dernier rang. Tous nos traîneurs de casseroles pourront donc encore se consoler en clamant que leurs collègues du Venezuela, d’Argentine, de Côte d’Ivoire ou du Liban seraient aux yeux de leurs concitoyens encore plus cyniques. Et sans aucunement chercher à sauver l’image de nos politiciens, on gardera à l’esprit qu’il convient de traiter ce genre de sondage avec une certaine prudence, vu que l’échantillon de personnes interrogées pour Madagascar se limitait à 83 responsables d’entreprise.
Il reste que cette parution a le mérite de permettre de poser une vraie question : quelle part des réussites ou des difficultés économiques d’un pays est effectivement imputable aux hommes politiques ? Il est difficile par exemple de comparer la Côte d’Ivoire, où les populations et les infrastructures sont directement victimes des affrontements politiques, et la Belgique, qui continue de tourner même si elle n’a pas de gouvernement depuis plus d’un an.
À cet égard, l’on ne peut pas non plus comparer des économies très planifiées ou qui ont tout le mal du monde à sortir du modèle étatique, à d’autres où le champ de l’action politique est soumise à tellement de contraintes face à des acteurs économiques très autonomes que certains n’hésitent pas à s’inquiéter de ce qu’ils qualifient désormais de crise de l’État.
Dans notre cas, malgré le glissement de l’activité économique que l’on observe à l’occasion de chaque crise politique à Madagascar, les personnes sondées par le Centre des études économiques de l’Université d’Antananarivo pour le compte du Forum économique mondial citent des facteurs essentiellement étatiques comme principaux obstacles à la conduite des affaires : instabilité gouvernementale et changements de régimes (19,7% des réponses), instabilité des politiques mises en œuvre (17,9%) et corruption (13,2%). Parmi les pays étudiés, seuls le Népal, le Pakistan, la Thaïlande, et dans une moindre mesure l’Ukraine, font apparaître un profil similaire.
Pour nos politiciens, il n’y a vraiment pas là de quoi se sentir fier...
No comments:
Post a Comment