La "une" du dernier numéro de "News of the World".
"Thank you and goodbye" ("Merci et adieu") : tel est le titre qui barre la Une du dernier numéro de l'hebdomadaire dominical britannique News of the World, dont la suppression a été annoncée cette semaine, suite à un scandale d'écoutes téléphoniques. Cinq millions d'exemplaires ont été imprimés pour l'occasion, soit près du double du chiffre habituel, en prévision d'une demande exceptionnelle pour ce numéro fatalement historique.
Cette ultime édition est l'occasion pour le journal, fondé en 1843, d'ouvrir la boite à souvenirs et de rappeler quelques uns de ses plus grands scoops, souvent sulfureux, qui lui ont valu son succès populaire (voir la vidéo sur le site Internet). "Après 168 ans, nous finissons par dire adieu avec tristesse, mais aussi beaucoup de fierté à nos 7,5 millions de lecteurs fidèles", peut-on lire dans le journal.
"Nous avons perdu notre chemin", juge cependant un éditorial d'une page entière, en expliquant qu'il "n'y a aucune justification à la peine causée aux victimes" des écoutes, tout en soulignant que le journal faisait partie du paysage britannique, au même titre que le "rôti du repas dominical".
"En ce jour historique, après 8674 éditions, vous allez nous manquer, vous, nos 7,5 millions de lecteurs. Vous avez été notre vie. Nous vous avons fait rire, pleurer, nous vous avons fait décrocher la machoire de stupéfaction, nous vous avons informé, nous vous avons ravi, nous vous avons fait enrager. Vous avez été notre famille, et pendant des années nous avons été la vôtre, vous rendant visite chaque week-end. Merci pour votre soutien. Vous allez nous manquer au-delà de ce que les mots peuvent exprimer", conclut le texte.
Dans les rangs de la rédaction, l'amertume est grande. Les journalistes du tabloïd ont le sentiment d'avoir été sacrifiés sans ménagement pour préserver les intérêts en Grande-Bretagne de Rupert Murdoch et du groupe News Corp, soucieux de ne pas voir cette affaire faire capoter un projet de rachat de la chaîne de télévision à péage BSkyB. En outre, la fermeture de News of the World permettrait à Murdoch de faire des économies tout en compensant la disparition du tabloïd par une parution dominicale du Sun, un autre de ses titres phares.
Mais la fermeture du journal ne met pas au scandale, qui connaitra des suites judiciaires. Le journal est accusé d'avoir piraté depuis 2005 les messageries de milliers de célébrités, de Hugh Grant au prince William, mais également d'une écolière assassinée et de proches de soldats tués en Irak (lire notre article). Il aurait de plus payé des policiers informateurs. Enfin, selon le Guardian, des millions d'e-mails compromettants auraient été détruits tout récemment par News International, la branche britannique de News Corp.
Trois personnes ont été interpellées depuis vendredi matin, en particulier Andy Coulson, l'ancien rédacteur en chef du tabloïd et ex-directeur de la communication du premier ministre David Cameron. M. Coulson a été libéré sous conditions, après une journée de garde à vue, comme les deux autres personnes interpellées.
Pour tenter d'éteindre l'incendie, Rupert Murdoch a décidé de venir en personne. Il est attendu dimanche à Londres.
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