Monday, February 28, 2011

Les 21 otages des pirates somaliens libérés à Antsiranana : 12 pirates arrêtés, 1 mécanicien abattu à bout portant et jeté par-dessus bord



Quatre mois privés d’eau et de nourriture. Quatre mois d’angoisse sous la menace d’armes. Les passagers de Zoulficar ont finalement retrouvé la terre ferme. Reportage…

L’émotion était à son comble hier à Diégo. Les 21 passagers – amaigris, dénutris et déshydratés, la peau halée et burinée par les intempéries, - sont enfin libérés après quatre mois de captivité. Leur calvaire a pris fin avec l’arrestation par les militaires malgaches des douze pirates somaliens qui les ont enlevés en pleine mer, alors qu’ils faisaient cap sur Dar es-Salaam, à bord du Zoulficar, après avoir quitté les Comores.

Ainsi, remorqué par le bateau Marina sur 140 km, le Zoulficar a pu rejoindre la rade de Diégo vers 9 heures du matin, hier, après quatre mois en haute mer sous le contrôle des pirates somaliens. Les passagers cosmopolites constitués par des ressortissants malgaches, tanzaniens et comoriens fondirent en larmes à l’approche de la côte antsiranaise. « Je n’ai plus espéré regagner la terre et être en vie. Les pirates étaient trop arrogants et nous craignons à tout moment pour nos vies. Durant presque quatre mois, nous avons vécu une vie de galère. A chaque fois que nous nous permettons de bouger un peu, on nous pointait immédiatement des armes sur le front. Et parfois, les pirates apparemment sous l’effet de la drogue, ouvraient le feu, juste pour nous intimider et nous prouver qu’ils ne sont pas là pour plaisanter » selon Hassan le maître de l’équipage. Le chef-mécanicien de Zoulficar a été froidement abattu par balles le 31 octobre et son corps fut jeté par-dessus bord. Depuis cette scène atroce, le message est passé : les passagers sont confrontés à des gens sans état d’âme. La peur était à son comble pour les trois femmes à bord. L’une d’entre elles aurait dû bénéficier d’une évacuation sanitaire sur Dar Es-Salaam pour une opération chirurgicale.

Arbahin. Hier, les passagers de Zoulficar ont immédiatement reçu les premiers soins d’urgence. Leurs vies ne sont plus en danger. La plupart des femmes étaient placées sous perfusion après une longue période de déshydratation et de malnutrition. Aux Comores, tout le monde ne s’attendait plus à ce que ces gens soient encore en vie. Cette Nation a déjà organisé l’Arbahin, un rite destiné à rendre hommage aux morts. « Après quatre survols aériens et quelques opérations de localisation par l’avion européen du dispositif Atalante appuyé par un navire de la marine indienne, Zoulficar a finalement été localisé vendredi vers 20 heures trente. La marine malgache n’a pas attendu plus longtemps pour mettre en route son plan d’intervention.

A bout de souffle. Les commandos de la 2ème RFI et de la gendarmerie de la base aéronavale d’Antsiranana ont été à pied d’œuvre puisque les pirates étaient encore supposés être armés. Sur place, tous les individus à bord ont levé les mains en l’air afin d’éviter toute confusion. Les pirates, quant à eux, ont hissé un drapeau blanc en signe de reddition. « Il n’y eut aucune velléité de riposte de leur part » selon le Capitaine de vaisseau Rolland Rasolofonirina qui a diligenté l’opération militaire avec ses 30 commandos. Une opération qui est destinée au sauvetage des otages et au secours des passagers malades, sans oublier l’arrestation des présumés pirates. « Nous avons survécu avec les quarante sacs de riz et cinq de sucre à bord. Nous n’avons mangé que cela à raison de deux fois par jour et pendant les quatre mois. Avant-hier, il ne nous restait plus que trente litres d’eau douce, soit l’équivalent de notre besoin de la journée. Nous étions à bout de souffle lorsque l’équipe de secours est finalement arrivée au grand soulagement de tous les passagers » a expliqué Abdou Ali, second mécanicien du bateau. Hier, la marine nationale a poussé un ouf de soulagement en bouclant cette affaire. Il reste à la police judiciaire de continuer le traitement du dossier à travers ses enquêtes qu’elle ouvrira très prochainement. « Comme les arrestations se sont déroulées dans le territoire maritime malagasy, et qu’il y avait des Malagasy parmi les victimes du méfait des pirates sur le bateau, ces bandits des hautes mers seront par conséquent traduits devant la justice malagasy » selon le Procureur de la République de Diégo, Mohamed Abdou Ali.

La marine malgache mérite d’être félicitée après son intervention qui n’a fait aucune perte en vie humaine ni de dommages matériels. Malgré l’âge du patrouilleur « Trozona » la marine a mené de main de maître cette opération. Au grand dam des pirates somaliens. Il serait temps de doter cette entité d’équipements adéquats pour mieux faire face aux menaces de plus en plus fréquentes dans cette région.


Chronologie des faits

31 octobre : le bateau Zoulficar, en provenance de Moroni met le cap sur Dar Es-Salaam, avec 22 personnes à bord. Le bâtiment est pris d’assaut par des pirates somaliens embarqués sur deux vedettes rapides de 40 et 50 chevaux. Le chef mécanicien Ali Oussouf a été tué par balle et jeté à la mer le même jour. Le bateau a été détourné à Mogadiscio. Par la suite, il a été utilisé par les pirates pour d’autres actes en haute mer (le bateau PANAMA fut l’une de leurs victimes)

09 février : les pirates se sont organisés en équipe de rotation. Une troisième équipe était montée à bord de Zoulficar pour attaquer vainement un autre navire portant le nom de « Delmas ». Quatre des pirates ont trouvé la mort lorsque leur vedette rapide s’était renversée en mer durant cette attaque survenue dans les eaux territoriales des Seychelles.

19 février : Zoulficar a été à court de carburant. Les pirates ont décidé de l’abandonner mais ils sont revenus lorsqu’ils se sont rendus compte que leurs réserves en carburant ne suffisent pas pour rentrer en Somalie. C’est ainsi que le commandant de bord Soalihi Boanaheri a négocié leur désarmement, avant qu’il n’accepte de nouveau ces pirates à bord.

21 février : Deux pirates ont décidé d’emmener avec eux le commandant de bord censé connaître la voie pour atteindre les côtes malgaches avec deux passagers et deux membres de l’équipage. Arrivés à Diégo, les deux pirates furent arrêtés par la gendarmerie du Port.

23 février : la marine nationale entame son plan d’intervention. Premier survol sans aucun résultat.

24 février : survol dans la zone côtière (Vavapasy à Cap d’Ambre).

25 février : survol des eaux territoriales des Comores. Intervention de la Force Navale Européenne avec l’avion de détection Atalanta. Intervention de la marine indienne. Vers 20 heures. Toutes les équipes de localisation sont unanimes sur la position du Zoulficar, à 140 km au nord-est de Diégo.

26 février : vers 11 heures et demie, la marine nationale était sur place et commençait à entreprendre son intervention.

27 février : Zoulficar a été remorqué par le navire MARINA et arrivait à bon port à Diégo.

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