"Il n'y a pas grand chose à en dire - Il y a des tas de femmes qui attendent un enfant, ce n'est pas intéressant pour les Français". La phrase est de Carla Bruni-Sarkozy, et extraite d'une interview donnée à la chaîne britannique BBC World Service, le 26 septembre.
Une interview menée par Christine Ockrent, épouse de l'ex-ministre des affaires étrangères Bernard Kouchner et amie de Mme Bruni-Sarkozy, et dont cette phrase sur sa grossesse constitue le point clé, repris par la presse du monde entier. Elle illustre à elle seule toute l'opération menée par la première dame et l'Elysée : communiquer le plus discrétement et le plus sobrement possible sur l'événement.
La "peoplisation" a coûté cher à Nicolas Sarkozy. De l'avis des politologues, l'affichage dans les médias de son divorce, puis de sa rencontre et du début de sa relation avec la chanteuse et ex-mannequin franco-italienne a largement contribué à sa brutale chute de popularité dans les sondages, à partir de l'automne 2007. Le chef de l'Etat a depuis reconnu des "erreurs". Et corrigé sa communication, même s'il a parfois cédé de nouveau à la tentation de la "peoplisation". C'est ainsi qu'en 2009, fut mise en scène une rencontre entre Carla Bruni et des lectrices de Femme actuelle, au cours de laquelle Nicolas Sarkozy fit une brève intervention.
UNE ANNONCE GÉRÉE PAS À PAS
Mais ce type d'opérations rencontrent un succès mitigé, notamment car les adversaires du chef de l'Etat n'hésitent pas à critiquer cette démarche. La grossesse de Mme Bruni-Sarkozy-Sarkozy et la communication qui en est faite ont donc obéi à une série d'impératifs. L'annonce de cette grossesse fut déjà complexe : Closer l'annonce le 22 avril, sans confirmation. L'Elysée refuse de commenter. L'épouse du chef de l'Etat fait la "une", le mercredi suivant, 27 avril, de Paris-Match. Mais l'hebdomadaire ne l'interroge pas sur cette question.
Le 28 avril, l'hebdomadaire VSD évoque une "confirmation" venue d'un proche du couple, sans plus de détail. Le 2 mai, Carla Bruni-Sarkozy continue son offensive médiatique en s'adressant aux lecteurs du Parisien . Cette fois, la question lui est posée. Elle répond... sans répondre. "Je suis en quelque sorte bouche cousue. Pas par arrogance ou par goût du secret, je suis bouche cousue pour protéger quelque chose et pour protéger tout le travail qu'il [Nicolas Sarkozy] fait". Sur les photos que publie le quotidien, la "première dame de France" tient un châle qui empêche de voir son ventre. De quoi faire monter encore la rumeur. Une rumeur encore entretenue par Bernadette Chirac, qui confirme le 15 mai à I>Télé que ce bébé à naître est "une chance pour la France".
Et ce n'est pas fini. Le 16 mai, Carla Bruni-Sarkozy est au journal télévisé de 13 heures, sur TF1. Et le présentateur, Jean-Pierre Pernault, continue d'alimenter le feuilleton en lui lançant un mystérieux '"je sais que vous détestez qu'on parle de votre vie privée, mais j'ai envie simplement de vous féliciter". "Je vous félicite aussi", répond-elle. Le lendemain, Pal Sarkozy, le père du chef de l'Etat, confirme au journal allemand Bild : "Je me réjouis de l'arrivée de mon petit-fils". Il détaille même, expliquant que les deux futurs parents "ne veulent pas connaître le sexe de l'enfant à l'avance, mais je suis sûr que ce sera une fille et qu'elle sera aussi belle que Carla". Il n'y a pas de confirmation officielle, mais pas non plus de démenti. La France est désormais au courant, sans que le couple présidentiel ne puisse être accusé d'exploiter l'information.
UNE DISCRÉTION TRÈS MÉDIATISÉE
Le 28 mai, Carla Bruni-Sarkozy fait une sortie remarquée en marge du sommet du G8 à Dauville. Pour la première fois, elle s'attarde devant photographes et caméras en affichant un ventre arrondi par sa grossesse. Deux jours plus tard, le quotidien belge Le Soir cite Jacques Séguéla, publicitaire proche du couple présidentiel, selon lequel le bébé à naître serait un garçon. L'information est reprise en France.
Quelques jours plus tard, le 3 juin, elle pose en couverture du magazine féminin Elle, qui consacre une enquête à sa grossesse, agrémentée de nombreuses photos. Mais le magazine s'étonne de sa réticence à s'exprimer sur la question. Isabelle Balkany, proche du couple présidentiel, estime qu'"elle a souhaité que cela reste un événement privé".
Le 10 juillet, le Journal du Dimanche annonce dans une brève que l'épouse du chef de l'Etat ne pourra pas assister aux cérémonies du 14 juillet car elle est astreinte au repos. Le journal précise que M. Sarkozy rejoindra le Var et son épouse chaque weekend. Les photos fleurissent également. Le 11 juillet, le couple est pris sur la plage, non loin du fort de Brégançon, résidence estivale officielle. Carla Bruni-Sarkozy est en maillot deux-pièces aux côtés de son époux. Les clichés en provenance de paparazzis, et publiés par Paris-Match en France, font le tour du monde. Mais officiellement, il n'y a toujours aucune communication.
Le 21 juillet, Carla Bruni-Sarkozy s'agace, selon des informations d'Europe 1. La "première dame" porte plainte contre l'hebdomadaire people Gala, qui publie en "une" une photo d'elle, titrée "je vis un bonheur insespéré". Les photos provenaient d'une rencontre entre Mme Bruni-Sarkozy et des épouses de marins. Prises par un photographe de Nice-Matin, elles n'étaient pas destinées à la presse people, d'où l'ire de l'Elysée. Gala se défend en assurant avoir acheté en toute légalité les clichés. Une semaine plus tard, le 28 juillet, la presse s'amuse d'un colis envoyé par des employés d'une usine menacée de fermeture à la "première dame" : 187 couches-culottes.
"UN MOMENT UN PEU PRIVÉ"
A la rentrée, le couple Sarkozy-Bruni s'affiche à l'Elysée lors des journées du patrimoine, le 17 septembre.
Les images sont cette fois relayées par tous les journaux télévisés. la règle de discrétion qui prévalait semble quelque peu changer : la "première dame" va multiplier les interviews et les interventions médiatiques. En marge d'une visite dans une galerie place des Vosges, elle raconte à des élèves boursiers soutenus par sa fondation qu'elle "n'en peut plus". "Je dois rester assise ou allongée la plupart du temps. Ne plus fumer, ni boire de vin. J'ai hâte que ça ce termine". Des propos repris par Le Parisien le 20 septembre.
Le 25 septembre, France 2 diffuse un entretien de Michel Drucker avec l'épouse du chef de l'Etat. Dans cette vidéo, elle évoque une nouvelle fois son état, expliquant : "je me sens un peu grosse, mais très heureuse". Elle évoque "un moment où l'on a envie de se cacher (...) un moment un peu privé, au fond".
Le 1er octobre, elle accorde un long entretien à Madame Figaro. "Ces derniers mois, écrit le magazine, elle avait choisi la discrétion (...) Pour Madame Figaro, Carla dit tout". Dans cette interview, elle explique : "Je pense que l'instinct de survie se manifeste aussi avec le désir d'enfant".
Le 4 octobre, alors que la "première dame" termine cette offensive médiatique, Christophe Barbier, directeur de la rédaction de L'Express et ami de longue date de Carla Bruni-Sarkozy, écrit sur son blog une note intitulée "conversation avec Carla", une réponse à des rumeurs qui évoquaient un accouchement imminent de la première dame dans cette clinique, cernée par les paparazzis. "Ayant la chance de connaître Carla Bruni-Sarkozy, je lui ai parlé ce matin au téléphone. Elle n'est absolument pas à la clinique et, comme toute femme enceinte, ne connaît pas au jour près le terme de sa grossesse. Par ailleurs, elle est désolée que l'actuel emballement médiatique trouble le travail et le quotidien du personnel de la Clinique de La Muette".
Anticipant l'accouchement, VSD et Paris Match publient, la même semaine, des "unes" laissant entendre que Mme Bruni Sarkozy a accouché. L'une titre '"Carla maman", l'autre "Carla et Nicolas Sarkozy, un nouveau bonheur"
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