De g. à dr., Omer Beriziky, Nestor Razafindrorika et Désiré Rasidy, samedi à Mahazoarivo.
Impuissance
Impuissance! Tel est le terme exact déterminant le sentiment des ménages de la capitale actuellement. Depuis le retour du délestage, bon nombre de gens voient aujourd’hui leurs activités menacées. Dépendant d’une manière directe ou indirecte de l’électricité, ils passent plus d’heure à ne rien faire qu’à travailler, à cause de la coupure. Les dépenses sont alors plus élevées que les bénéfices, et de nombreuses boîtes tournent à perte. « Je crains fort un bilan négatif à la fin du mois. À cause de la coupure, notre recette a fortement diminué, contrairement à la facture de la Jirama. Le salaire de nos trois employés doit être payé, sans parler du loyer du local, du prix des produits et des frais de scolarité des enfants », se plaint Tahina Razafijemisa, propriétaire de la coiffure Pastel à Ankadifotsy.
Si en moyenne, son salon peut recevoir sept clients par jour, le délestage a réduit ce nombre à trois. Elle perd au quotidien Ar 24 000, soit
Ar 720.000 en un mois, pour un coût moyen du service à Ar 6000 par personne. « Outre le weekend, le délestage commence souvent à 6h du matin pour ne se terminer qu’à 11h. Il reprend en général vers 15h30 jusqu'à 17h. Les clients, en voyant la coupure, vont ailleurs », se plaint-elle. Les salons de coiffure espèrent, toutefois, rattraper leur perte durant le mois de décembre. « Nous comprenons que la Jirama soit dans la difficulté, mais nous aussi, sans électricité, on ne peut pas vivre. Si la Jirama est obligée de procéder à la coupure, ainsi soit-il, mais qu'elle nous accorde le mois de décembre comme période de sursis », implore Soloniaina Rafanomezantsoa, coiffeuse à Ambohimanarina.
Black out total
Outre la coiffure, d'autres métiers libéraux sont aussi menacés par le délestage. Les artisans soudeurs sont, par exemple, obligés de fermer leur porte en cas de coupure. Allan Jean Randriatany, propriétaire de l'atelier « Tsiky vy », aux 67ha, raconte qu'en une journée, ils ne peuvent pas travailler entre 9h et 15h. Or, « j’emploie huit chefs de famille dont un est payé mensuellement, trois quotidiennement, et quatre sont des employes temporaires. Actuellement, nous dépensons plus que nos gains. La facture à payer reste élevée, alors que les clients partent là où il n’y a pas de déléstage. Pour compenser notre perte, nous sommes obligés de vendre certains outils de travail », raconte tristement, le propriétaire de l'atelier Tsiky Vy.
Mais les impacts négatifs du délestage se ressentent également dans d'autres secteurs. Nombreux exportateurs risquent aujourd'hui de perdre leur marché, faute de pouvoir honorer correctement les échéances de commandes. Comme cette chose n'est pas du tout tolérée par les importateurs, certains risquent de voir leurs clients s'en aller ailleurs si la situation perdure. Tel est par exemple le cas d'un tailleur de pierre a Talatamaty, « nos clients commencent à hausser le ton. Ils ne se soucient pas de notre délestage, ils veulent que leurs commandes arrivent à temps ».
En fait, les conséquences du déléstage font tache d'huile. Un secteur touché d'une manière directe les répercute à d'autres Mais plus importante encore, la coupure d'électricité constitue un danger pour la vie de l'être humain lui-même. Sans parler de l'insécurité, certains hôpitaux sont aussi victimes des coupures. Elles peuvent être périlleuses en survenant au moment d'une opération délicate. Tout peut arriver jusqu'au moment où un groupe prend le relais.
Potentiel identifié estimé à 7 800 MW
Actuellement, 70% de notre source d’énergie nécessite du carburant. Le potentiel identifié est estimé à 7 800 MégaWatt (MW), alors que la Grande Île n'en utilise que 125. L'exploitation d'une partie de ce potentiel peut mettre Madagascar à l'abri du délestage, dans la mesure où le besoin du pays est estimé à 450MW. Pour Antananarivo, l'abondance de pluie (60% des sources hydrauliques) ou la mise en application de la convention devrait résoudre le problème de coupure. Le besoin de la capitale est estimé à 170MW, et aujourd'hui 160MW sont fournis, d'où un gap de 10 MW.
Un espoir dans la résolution du délestage.
L'État s'engage, à travers une convention tripartite entre le ministère des Finances et du budget, celui de l'Energie et la Jirama à payer directement les fournisseurs de cette dernière. Cette décision a été prise mardi dernier, lors d'une rencontre entre les concernés, et devrait être signée cette semaine. « L'État n'a probablement pas les moyens de rembourser en une seule fois ses dettes à la Jirama. Il préfère s'arranger avec les fournisseurs », indique Nestor Razafindrorika, ministre de l'Énergie, samedi, après la rencontre avec le premier ministre Omer Beriziky, en compagnie de la direction générale de la Jirama à Mahazoarivo. En effet, le montant de la dette de l'État malgache envers la compagnie de gestion de l'eau et de l'électricité est aujourd'hui estimé à Ar 75 miliards. Selon un haut fonctionnaire auprès de l'administration, il s'agit
« d'une dette accumulée depuis l’administration Ratsiraka. Normalement, le coût de l'eau et de l'électricité de la Jirama est inclus dans le budget de fonctionnement de chaque ministère, mais nombreux sont ceux qui ne payent pas régulièrement leurs factures ».
L'argent que l'État payera aux fournisseurs sera ainsi déduit de ce qu'il doit à la Jirama. Désiré Rasidy, le directeur général de la compagnie indique que cette mesure permettra d’ajouter 15 MW supplémentaire à Andekaleka. Si cet objectif est atteint, la capitale ne devrait plus connaître de problème de délestage. Cette convention devrait aussi permettre à la compagnie de se remettre sur pied, si chaque partie respecte sa part d'engagement. « La compagnie traverse actuellement une période très difficile. Celle-ci ne date pas d'aujourd'hui, mais jeudi a été le pic de la crise », reconnaît d'ailleurs Nestor Razafindrorika.
Solutions
Depuis lundi dernier, les Tananariviens n'ont pas uniquement été victimes de la coupure d'électricité mais aussi celle de l'eau. Celle-ci s'est intensifiée jeudi. Omer Beriziky évoque ainsi la nécessité de tout faire pour résoudre ces problèmes dans les plus brefs délais. « Nous sommes conscients que le délestage entraîne des difficultés pour bon nombre de ménages. C’est pour cette raison, que des solutions doivent être trouvées au plus vite », indique t-il.
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