Tuesday, January 17, 2012

Crise financière : la Chine doit trouver "d'autres ressorts de croissance"

La Chine a enregistré un ralentissement de sa croissance en 2011.REUTERS/STRINGER SHANGHAI


Danielle Schweisguth, économiste à l'OFCE (Observatoire français des conjonctures économiques) et spécialiste de la Chine, estime que celle-ci doit diriger ses exportations vers les pays émergents pour continuer à entraîner la croissance mondiale.

La croissance de la Chine s'est établie à 9,2 % en 2011, enregistrant un léger recul par rapport à 2010 (10,4 %). Quels sont les facteurs qui expliquent cette baisse ?

Il y a tout d'abord un facteur externe : le ralentissement des exportations. Cette année, les exportations chinoises en valeur ont augmenté de seulement 15 % contre 30 % en 2010. La baisse de la demande américaine et européenne, liée à la crise, en est la cause principale. Mais cette baisse est toutefois beaucoup moins importante qu'en 2009, où l'effondrement de la demande mondiale avait entraîné une chute de 17 % des exportations chinoises. A ce moment-là, tous les pays ont été affectés en même temps par la crise, notamment en Europe, où ils sont tous entrés en récession.

Aujourd'hui, le cas de figure n'est pas le même : les Etats-Unis ne s'en sortent pas si mal et en Europe, la récession s'annonce moindre. Le commerce extérieur est donc toujours dynamique – même s'il l'est moins qu'avant la crise – et tire la croissance du pays.

Il existe en outre un facteur interne : les mesures de resserrement monétaire et de restriction du crédit mises en place par le gouvernement en 2011 pour freiner la hausse des prix. Ces mesures ont permis de limiter l'inflation dans l'alimentaire. Mais Pékin a également mis moins de liquidités en circulation dans l'économie, ce qui a freiné l'investissement.

La croissance de la Chine va-t-elle continuer à jouer un rôle d'"amortisseur" de la crise mondiale ?

Le produit intérieur brut de la Chine représente en dollars plus de la moitié du PIB américain, donc le pays est en mesure de peser suffisamment lourd pour amortir la crise et continuer à jouer un rôle de moteur pour la croissance mondiale. Mais pour cela, elle va devoir trouver d'autres ressorts de croissance, notamment en basculant ses exportations vers l'Amérique latine, l'Afrique et les pays émergents en général.

Son rôle de "locomotive" se fera sentir pour les pays dont la Chine représente une part importante dans les exportations, comme les pays africains, asiatiques ou détenteurs de matières premières. En revanche, pour les pays de l'Eurozone, il ne faut pas compter sur la Chine pour résoudre la crise de la dette. Elle peut aider, mais son rôle reste marginal. Pékin n'est pas officiellement impliqué dans l'apport au capital du Fonds européen de stabilité financière (FESF), même si l'on sait qu'il fait partie des acheteurs de dette souveraine.

Quels sont les enjeux du modèle économique chinois à terme ?

La Chine paye aujourd'hui les conséquences du plan de relance de 2009. Pékin avait alors injecté beaucoup de liquidités dans l'économie, ce qui a généré un grand nombre de créances douteuses. A terme, cela peut être une bombe à retardement et entraîner une crise financière. Tout dépendra de la manière dont le gouvernement va gérer ces prêts.

A l'avenir, tout l'enjeu pour la Chine réside dans sa capacité à migrer vers un modèle économique où la demande intérieure est plus forte, notamment en passant par l'augmentation des salaires. L'instauration d'un système plus généreux de protection sociale permettrait également de diminuer l'épargne des ménages chinois, et favoriserait ainsi la consommation.

No comments: