Ravalo
n’aimait pas qu’on travaille le dimanche, jour du Seigneur. Du temps où
il était Maire de Tana, les travaux de réfection des rues se faisaient
en jour de semaine, ce qui avait pour conséquence de créer des bouchons
terribles. Et qu’est-ce qu’on pestait alors en disant qu’on perdait tout
de même des heures de travail dans ces embouteillages.
Rajoelina par contre n’aime pas qu’on travaille pendant les jours de travail, si on considère le nombre de ponts décrétés depuis qu’il s’est emparé du pouvoir. Pour lui, toutes les occasions sont bonnes pour organiser des fêtes, pour détruire chez les malgaches la valeur de l’effort et le sens du travail bien fait… ou pire, le sens du travail tout court. Et sa vraie devise est d’ailleurs tu mangeras à la sueur de ton pont comme le disait Tonton Georges.
Mais en parlant de travaux routiers et de ponts, cela me fait penser que ces gens qui nous gouvernent ou qui nous ont gouverné sont tous d’éminents ingénieurs, qui excellent dans les travaux publics. Ils ont porté haut la réputation des infrastructures malgaches, battant les records mondiaux, à faire pâlir les vrais techniciens, et cela sans avoir à se soucier des calculs de structures, ou des contraintes des matériaux de construction.
D’abord, Ratsiraka a fait le tunnel le plus long : ce n’est pas celui construit en 1934 et qui se trouve sur la ligne de chemin de fer FCE (1072 m), mais le tunnel de la révolution socialiste. Notre ingénieur rouge nous promettait régulièrement à chaque discours kely sisa dia ho tafavoaka ny tunnel. Il a pourtant fallu une quinzaine d’année pour en sortir. Et à côté, le tunnel en cours de construction en Suisse qui est réputé être le tunnel le plus long du monde (57 km) fait vraiment piètre figure : il faudra à peine un quart d’heure pour le traverser avec un train passager.
Ravalo, lui, a transformé le pays en un grand chantier à ciel ouvert, en faisant des routes une de ses nombreuses priorités. S’était-il inspiré de John F. Kennedy qui disait que ce n’est pas notre richesse qui a construit nos routes, mais ce sont nos routes qui ont construit notre richesse en faisant imprimer le dessin d’une route sur le plus grand billet de banque malgache ? Son mandat était la période où l’on avait beaucoup de mal à trouver des ingénieurs en Travaux Publics qui se faisaient payer cinq voire dix fois plus qu’en temps normal. Même les techniciens supérieurs avaient de hautes prétentions. Malheureusement, le défi qu’il avait fixé dans le MAP était trop élevé, ce qui a amené les responsables du secteur à étirer un peu leurs résultats. En vérité, il manquait les ressources financières, le temps et aussi les ressources humaines pour atteindre les objectifs routiers fixés dans le MAP.
Quant à Rajoelina, il peut être fier d’avoir fait le pont le plus long. Inutile de mentionner que le pont le plus long à Madagasikara est le pont Sofia (810 m) sur la RN6, ni que le pont le plus long au monde est en Chine (42,4 km) qui se traverse en moins d’une heure, car notre ingénieur orange a fait mieux : après 42 mois, on est encore sur le tetezamita et je ne suis même pas sûre qu’on soit déjà sur le vrai (tetezamita).
Rajoelina n’est pas seulement connu pour la longueur ou le nombre de ses ponts, mais c’est aussi un coupeur de route professionnel. Alors que la longueur des routes dans la Capitale ne suffisait déjà plus pour absorber le trafic existant, et en considérant l’accroissement important du parc automobile depuis 2009 [1], il s’est amusé à couper l’Avenue de l’Indépendance, l’une des artères les plus circulées de la ville. Et à chaque période où la circulation est la plus dense, notamment durant les périodes de fêtes, il s’amuse systématiquement (c’est fou ce qu’il s’amuse) à couper des artères pour des podiums ou des inaugurations obscures.
Celui qui n’a manifestement pas gagné son titre d’ingénieur, c’est le PDS actuel d’Antananarivo, vu l’état déplorable de nos rues. On se croirait du temps de la deuxième République. Cela justifierait presque l’utilisation de ces encombrantes et polluantes Hummer… Et dire que je pensais qu’on n’aurait jamais plus à slalomer entre les petits et grands trous dans les rues de Tana.
Il y a quelques mois, des coups d’annonce sont parus dans les journaux que les travaux de réfection des rues allaient commencer. Ils ont en effet commencé à tailler les bords des nids de poule comme s’ils allaient les traiter. Depuis, il ne s’est rien passé, les trous se sont approfondis et leurs interventions n’ont fait qu’aggraver les choses. Si on n’a pas les moyens de réparer les routes, on n’accélère par leur dégradation. Le gel des financements extérieurs ne signifie pas le gel du raisonnement intérieur… Sauf si l’on n’est capable de réfléchir qu’avec les aides extérieures.
Mais revenons à nos ponts.
Une connaissance qui dirige une petite entreprise raconte à propos de la crise : « C’est vraiment dur. On fonctionne à 40% de notre capacité, on n’a renvoyé personne pour des raisons sociales. On vit sur notre capital, ce qui réduit notre capacité de fonctionnement quand les activités reprendront. Les petites entreprises comme les nôtres qui essaient de survivre et de garder la tête hors de l’eau ont beaucoup souffert : nous subissons un harcèlement fiscal, les charges sociales établies par une loi ont été modifiées par une simple annonce dans les médias.
Nous subissons les augmentations des charges (carburant, électricité), et nous n’avons aucune visibilité sur ce que nous pourrions faire dans un an, ni même dans 3 mois. Les rendements diminuent car le personnel est soucieux : ils ne dorment pas à cause de l’insécurité qui règne partout, certains doivent s’armer d’un pilotra pour rentrer chez eux, ils n’arrivent plus à faire face à leurs charges. Nous avons été victimes de cambriolages et nous avons aussi subi plusieurs vols internes car la mentalité se dégrade réellement.
Récemment, le gouvernement a décidé d’augmenter le point d’indice et le salaire minimum. C’est bien pour les employés, mais comme on n’a pas de contrats pour faire face à cette augmentation, on va finalement devoir licencier. Et en plus, avec tous ces ponts décrétés par le gouvernement, on doit payer le personnel à ne rien faire. »
Bref, ces innombrables ponts, qui sont d’ailleurs irréguliers, ont des conséquences sur notre vie économique. Mais cela, ces voleurs de pouvoir ne s’en soucient guère. C’est un peu normal, car pour eux, l’argent est fabriqué dans les distributeurs oranges ou se ramasse dans les bois (de rose)...
Rajoelina par contre n’aime pas qu’on travaille pendant les jours de travail, si on considère le nombre de ponts décrétés depuis qu’il s’est emparé du pouvoir. Pour lui, toutes les occasions sont bonnes pour organiser des fêtes, pour détruire chez les malgaches la valeur de l’effort et le sens du travail bien fait… ou pire, le sens du travail tout court. Et sa vraie devise est d’ailleurs tu mangeras à la sueur de ton pont comme le disait Tonton Georges.
Mais en parlant de travaux routiers et de ponts, cela me fait penser que ces gens qui nous gouvernent ou qui nous ont gouverné sont tous d’éminents ingénieurs, qui excellent dans les travaux publics. Ils ont porté haut la réputation des infrastructures malgaches, battant les records mondiaux, à faire pâlir les vrais techniciens, et cela sans avoir à se soucier des calculs de structures, ou des contraintes des matériaux de construction.
D’abord, Ratsiraka a fait le tunnel le plus long : ce n’est pas celui construit en 1934 et qui se trouve sur la ligne de chemin de fer FCE (1072 m), mais le tunnel de la révolution socialiste. Notre ingénieur rouge nous promettait régulièrement à chaque discours kely sisa dia ho tafavoaka ny tunnel. Il a pourtant fallu une quinzaine d’année pour en sortir. Et à côté, le tunnel en cours de construction en Suisse qui est réputé être le tunnel le plus long du monde (57 km) fait vraiment piètre figure : il faudra à peine un quart d’heure pour le traverser avec un train passager.
- Le fameux pont flottant de Ratsiraka. Les piroguiers qui circulaient sur ce fleuve étaient obligés de faire un transbordement de leur cargaison de bananes car le pont leur barrait le chemin.
Ravalo, lui, a transformé le pays en un grand chantier à ciel ouvert, en faisant des routes une de ses nombreuses priorités. S’était-il inspiré de John F. Kennedy qui disait que ce n’est pas notre richesse qui a construit nos routes, mais ce sont nos routes qui ont construit notre richesse en faisant imprimer le dessin d’une route sur le plus grand billet de banque malgache ? Son mandat était la période où l’on avait beaucoup de mal à trouver des ingénieurs en Travaux Publics qui se faisaient payer cinq voire dix fois plus qu’en temps normal. Même les techniciens supérieurs avaient de hautes prétentions. Malheureusement, le défi qu’il avait fixé dans le MAP était trop élevé, ce qui a amené les responsables du secteur à étirer un peu leurs résultats. En vérité, il manquait les ressources financières, le temps et aussi les ressources humaines pour atteindre les objectifs routiers fixés dans le MAP.
Quant à Rajoelina, il peut être fier d’avoir fait le pont le plus long. Inutile de mentionner que le pont le plus long à Madagasikara est le pont Sofia (810 m) sur la RN6, ni que le pont le plus long au monde est en Chine (42,4 km) qui se traverse en moins d’une heure, car notre ingénieur orange a fait mieux : après 42 mois, on est encore sur le tetezamita et je ne suis même pas sûre qu’on soit déjà sur le vrai (tetezamita).
Rajoelina n’est pas seulement connu pour la longueur ou le nombre de ses ponts, mais c’est aussi un coupeur de route professionnel. Alors que la longueur des routes dans la Capitale ne suffisait déjà plus pour absorber le trafic existant, et en considérant l’accroissement important du parc automobile depuis 2009 [1], il s’est amusé à couper l’Avenue de l’Indépendance, l’une des artères les plus circulées de la ville. Et à chaque période où la circulation est la plus dense, notamment durant les périodes de fêtes, il s’amuse systématiquement (c’est fou ce qu’il s’amuse) à couper des artères pour des podiums ou des inaugurations obscures.
Celui qui n’a manifestement pas gagné son titre d’ingénieur, c’est le PDS actuel d’Antananarivo, vu l’état déplorable de nos rues. On se croirait du temps de la deuxième République. Cela justifierait presque l’utilisation de ces encombrantes et polluantes Hummer… Et dire que je pensais qu’on n’aurait jamais plus à slalomer entre les petits et grands trous dans les rues de Tana.
Il y a quelques mois, des coups d’annonce sont parus dans les journaux que les travaux de réfection des rues allaient commencer. Ils ont en effet commencé à tailler les bords des nids de poule comme s’ils allaient les traiter. Depuis, il ne s’est rien passé, les trous se sont approfondis et leurs interventions n’ont fait qu’aggraver les choses. Si on n’a pas les moyens de réparer les routes, on n’accélère par leur dégradation. Le gel des financements extérieurs ne signifie pas le gel du raisonnement intérieur… Sauf si l’on n’est capable de réfléchir qu’avec les aides extérieures.
Mais revenons à nos ponts.
Une connaissance qui dirige une petite entreprise raconte à propos de la crise : « C’est vraiment dur. On fonctionne à 40% de notre capacité, on n’a renvoyé personne pour des raisons sociales. On vit sur notre capital, ce qui réduit notre capacité de fonctionnement quand les activités reprendront. Les petites entreprises comme les nôtres qui essaient de survivre et de garder la tête hors de l’eau ont beaucoup souffert : nous subissons un harcèlement fiscal, les charges sociales établies par une loi ont été modifiées par une simple annonce dans les médias.
Nous subissons les augmentations des charges (carburant, électricité), et nous n’avons aucune visibilité sur ce que nous pourrions faire dans un an, ni même dans 3 mois. Les rendements diminuent car le personnel est soucieux : ils ne dorment pas à cause de l’insécurité qui règne partout, certains doivent s’armer d’un pilotra pour rentrer chez eux, ils n’arrivent plus à faire face à leurs charges. Nous avons été victimes de cambriolages et nous avons aussi subi plusieurs vols internes car la mentalité se dégrade réellement.
Récemment, le gouvernement a décidé d’augmenter le point d’indice et le salaire minimum. C’est bien pour les employés, mais comme on n’a pas de contrats pour faire face à cette augmentation, on va finalement devoir licencier. Et en plus, avec tous ces ponts décrétés par le gouvernement, on doit payer le personnel à ne rien faire. »
Bref, ces innombrables ponts, qui sont d’ailleurs irréguliers, ont des conséquences sur notre vie économique. Mais cela, ces voleurs de pouvoir ne s’en soucient guère. C’est un peu normal, car pour eux, l’argent est fabriqué dans les distributeurs oranges ou se ramasse dans les bois (de rose)...
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