La scène s'est déroulée, mercredi, dans un commissariat de la ville de Bahawalpur, au Pakistan. La veille, la police avait arrêté un malang, un vagabond, accusé par plusieurs personnes d'avoir brûlé des pages du Coran, livre sacré de l'islam, religion d'Etat au Pakistan. L'accusé était un handicapé mental qui "n'était même pas capable de savoir où il habitait", selon un policier qui l'a interrogé.
Pendant cet interrogatoire, une foule a commencé à s'amasser autour du commissariat, exigeant que l'homme lui soit remis. "Des personnes ont commencé à faire des annonces sur les haut-parleurs de la mosquée, demandant aux habitants d'aller au commissariat et de le punir", rapporte le Daily News. Très vite, près de 2 000 personnes ont encerclé le bâtiment. Quand la police a refusé de remettre l'accusé, "ils ont saccagé les lieux et emmené l'homme de force avec eux", a déclaré à l'AFP Ghulam Mohiuddin, responsable de la police locale.
S'ensuit une scène de chaos. La foule pénètre dans le commissariat, rossant les policiers qui tentent de les en empêcher. Ils brûlent plusieurs motos et véhicules garés dans l'enceinte et, arrivant à la cellule où se trouve l'accusé, détruisent les portes et l'emmènent avec eux. Les milliers de personnes ont ensuite battu à mort l'homme avant de mettre le feu à sa dépouille. "Il n'y avait pas assez de policiers sur place pour pouvoir contrôler la situation et sauver la vie de l'accusé", a regretté le chef de la police locale. Le nom de la victime n'est pas encore connu avec certitude, tout comme sa religion.
Pour le Daily News, ce meurtre "montre la nature extrême des lois contre le blasphème au Pakistan, où quiconque est jugé coupable d'avoir insulté l'islam, son prophète ou le Coran est passible de la peine de mort". "Parfois, rappelle le journal, les gens se font justice eux-mêmes." Certains hommes politique pakistanais ont bien essayé de changer la loi. Ce fut le cas de Salman Taseer, gouverneur de la province du Pendjab. En 2011, il avait été assassiné par l'un de ses gardes du corps, qui lui reprochait d'être favorable à un assouplissement de la loi.
Dans un texte au vitriol publié sur le site du quotidien Dawn, le journaliste Nadeem F. Paracha a fait part de sa colère :
"Nous sommes tellement obnubilés par
les questions d'identité nationale et de priorités religieuses que je
suis sûr qu'en voyant les flammes s'élever au-dessus du corps sans vie
du blasphémateur, beaucoup d'hommes pieux ont dû les yeux, à la
recherche du 7e ciel où réside Dieu, espérant que le
Tout-Puissant fasse tomber une pluie de pétales de rose sur eux. Il ne
s'est rien passé, et personne n'a eu le courage de suggérer qu'en toute
vraisemblance Dieu a été horrifié par cet acte. Et encore une fois, la
nation a été obligée de voir sa foi et ses textes sacrés 'vengés' non
pas par des hommes religieux, mais par une foule de raclures barbares et
retardées."
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