Saturday, September 22, 2012

OGM : qu'a fait l'État ?


LE MONDE |
Lundi 1er mars, le Fonds stratégique d'investissement (FSI), organisme public détenu par l'Etat et la Caisse des dépôts, a décidé d'apporter 150 millions d'euros au capital de la coopérative agricole française Limagrain.

Shakespeare l'écrivait : "Les mauvaises nouvelles sont fatales à celui qui les apporte" (Antoine et Cléopâtre). Ainsi les critiques pleuvent-elles sur l'étude publiée par Gilles-Eric Séralini dans Food and Chemical Toxicology.


Si la méthode et les moyens s'en révèlent à l'examen faibles, erronés, ou biaisés, ses conclusions - le potentiel cancérigène d'une alimentation transgénique - en seront démenties. Il est essentiel et normal que cet examen se déroule avec rigueur. Mais ce n'est qu'un aspect du problème.
Une question essentielle est de savoir pourquoi un chercheur de qualité, employé dans une structure publique, a été obligé de chercher des fonds auprès de fondations privées pour pouvoir mener en catimini une étude d'un intérêt général.
De savoir pourquoi, alors que les organismes génétiquement modifiés sont entrés dans le débat public depuis plus de quinze ans, suscitent une interrogation collective, entraînent des conséquences majeures en termes d'économie agricole, de savoir pourquoi, donc, les autorités publiques n'ont pas demandé à des chercheurs publics des études approfondies et neutres sur la nocivité des OGM.
Le Centre national de la recherche scientifique, l'Institut national de la recherche agronomique sont-ils dénués à ce point de biologistes et d'expérimentateurs, qu'il faille toujours s'en remettre aux études pilotées par Monsanto, Syngenta, Pioneer, et dont les données restent secrètes, au nom du "secret industriel" ?
Poser la question, c'est souligner la passivité du corps politique et de l'institution scientifique. On ne peut la comprendre que par la dérive de l'activité scientifique depuis une trentaine d'années. Elle était auparavant financée par les fonds publics, ce qui permettait une plus grande liberté à la recherche. Elle est maintenant, de plus en plus souvent, financée ou orientée par des entreprises qui ont peu d'intérêt pour les recherches non appliquées et négligent les effets des technologies qu'elles veulent commercialiser.
La "science" n'est plus indépendante - cela est net dans le domaine des biotechnologies végétales. Par son opération de communication médiatique, M. Séralini prend à témoin les citoyens de ce problème. Derrière les querelles scientifiques sur la nocivité de tel produit ou technologie se joue un drame qu'un Shakespeare pourrait mettre en scène : celui du rapport entre l'argent et la vérité.

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