Concepts de défense
Désignation par le président de la République française du général d’armée aérienne Jean-Paul Paloméros au poste de Commandant suprême allié de la Transformation (6 août 2012)
Le général Paloméros est actuellement Chef d’état-major de l’armée de l’air française. Il prendra ses nouvelles fonctions à la fin du mois de septembre 2012 au Quartier général du Commandement suprême allié de la Transformation à Norfolk, aux Etats-Unis.Introduction
Tout en restant attachée
au principe d’indépendance nationale et soucieuse de la protection de
ses intérêts dans le monde ainsi que du respect des valeurs
démocratiques, la France apporte une attention particulière à sa
politique de défense et l’adapte constamment aux évolutions de la menace
et du contexte international.
Le contexte stratégique s’est profondément transformé.
Il se caractérise par une situation internationale durablement dégradée
et marquée par l’imprévisibilité, par l’accroissement très sensible des
risques dus à la poursuite de la prolifération des armes de destruction
massive, ainsi que par le changement d’échelle des menaces liées au
terrorisme. Par ailleurs, le développement de l’Europe de la défense,
que la France encourage activement, l’engage davantage que par le passé
dans la construction des capacités militaires européennes.
Sommaire
1. La doctrine française
Le concept français de défense, défini dans l’ordonnance du 7 janvier 1959, assigne à la politique de défense de la France trois objectifs :
Défendre les intérêts vitaux du pays,
dont la définition relève du président de la République et qui
comprennent, notamment, la population, le territoire et le libre
exercice de la souveraineté. Parallèlement, la France doit également
assurer la protection de ses intérêts stratégiques au niveau
international, tout en contribuant à la prévention des conflits, au
maintien ou au rétablissement de la paix, au respect du droit
international et des valeurs démocratiques dans le monde. Pour
l’essentiel, ces intérêts stratégiques résident dans le maintien de la
paix sur le continent européen et les zones qui le bordent
(Méditerranée, Moyen-Orient), et dans les espaces essentiels à
l’activité économique et à la liberté des échanges.
Œuvrer au développement de la construction européenne et à la stabilité du continent.
Le maintien du rang de la France dans le monde sera, pour une large
part, lié à son aptitude à influer sur la construction européenne et sur
les évolutions à venir de l’Europe. Ce choix européen s’impose pour des
raisons tant stratégiques qu’économiques. En outre, si la France
demeure libre de l’appréciation des conditions de sa sécurité et du
choix de ses moyens, elle reconnaît dans l’Alliance atlantique le lien
essentiel entre Européens et Américains, y compris pour des missions de
maintien de la paix pour le compte de l’ONU ou de l’Organisation pour la
sécurité et la coopération en Europe (OSCE). Ainsi, il s’agit de mettre
les capacités d’une Alliance atlantique rénovée - parvenue à un
meilleur partage des responsabilités entre les États-Unis et l’Europe -
au service des missions de maintien de la paix ou de règlement des
crises.
Mettre en œuvre un concept de défense globale qui ne se compose pas uniquement d’un aspect militaire.
En effet, la sécurité et la stabilité d’un État dépendent non seulement
de ses forces armées et de sa police, mais également de son
organisation sociale, de son système éducatif et de son mode de
fonctionnement en matière de solidarité. Le concept de défense est, de
fait, indissociable de celui de nation. Ainsi, la sécurité civile assure
la protection de la population, le maintien de l’ordre public et donc
la continuité de l’État. Elle englobe la prévention et la protection
face aux risques naturels et technologiques majeurs, la sécurité des
installations et des réseaux sensibles. Enfin, elle veille à la bonne
répartition des ressources en temps de crise.
2. Une stratégie adaptée au nouveau contexte international
L’évolution du contexte stratégique tout au long de la
décennie quatre-vingt-dix a démontré que la France bénéficiait désormais
d’une profondeur stratégique à l’Est, se chiffrant en milliers de km,
situation qu’elle n’avait jamais connue tout au long de son histoire.
Cependant, contrairement à certains espoirs, crises et conflits n’ont
guère cessé à travers le monde, selon des logiques, dans des cadres et
avec des acteurs souvent inédits et inattendus, générant une fragmentation et une multiplicité des menaces exercées par des acteurs étatiques ou non.
Les attentats du 11 septembre 2001 ont consacré
l’émergence d’un terrorisme de masse, générant des conflits d’un type
nouveau, sans champ de bataille et sans armée clairement identifiée, où
l’adversaire, prêt à utiliser des armes de destruction massive, vise
clairement les populations. La France est une société développée,
ouverte et à haut niveau technologique. Elle est donc particulièrement
vulnérable aux nouveaux types de menaces. Engagée, par ailleurs, dans un
ensemble de solidarités politiques, de communautés d’intérêts et
d’alliances, elle constitue une cible potentielle.
Face à cette double évolution du contexte international,
la France a adapté sa stratégie, et l’objectif central de sa politique
est la défense de la sécurité des Français et de leurs intérêts sur le
territoire et à l’extérieur (1,5 million de ressortissants à
l’étranger).
Conformément aux choix faits en 1996 dans le cadre de la
professionnalisation et de la définition du nouveau modèle d’armée, et
tout en prenant en compte les exigences de sa participation aux réseaux
de solidarité européen et atlantique, la France entend :
préserver
son autonomie de décision et d’action afin de conserver la liberté de
choisir de s’engager ou non dans des opérations avec ses partenaires ou
alliés, ainsi que la capacité d’agir seule lorsque cela est nécessaire ;
garder
son influence dans les alliances et les coalitions, ce qui suppose
qu’elle dispose de la capacité de " nation cadre " (dans une coalition,
il peut s’avérer utile, dans un domaine opérationnel donné, de s’appuyer
plus particulièrement sur une nation dite " nation cadre " capable de
fédérer les autres membres autour de ses propres capacités nationales)
pour la conduite d’une opération européenne, et de capacités militaires
suffisantes ;
maintenir
les savoir-faire technologiques indispensables pour assurer dans la
durée la crédibilité de la dissuasion nucléaire, développer les moyens
adaptés à la protection contre les nouvelles menaces, et préserver une
base industrielle, essentiellement européenne, en mesure de produire ses
principaux systèmes de défense.
Les grandes fonctions stratégiques s’articulent autour des idées de dissuasion, prévention, projection - action et protection.
La dissuasion, caractérisée par un concept de
non-emploi, implique de disposer de moyens diversifiés permettant
d’affirmer sa crédibilité face aux évolutions des menaces. La France
doit également pouvoir contribuer à la sécurité de l’Europe en tenant
compte de la solidarité croissante des pays de l’Union. Elle participe
activement à la mise en œuvre des instruments de stabilisation régionale
(traités FCE, " Ciel ouvert " - document sur les mesures de confiance
et de sécurité -, Accords de Dayton) ainsi qu’aux initiatives
développées en matière de maîtrise des armements dans le cadre de l’OSCE
(lutte contre la dissémination des armes légères et de petit calibre -
ALPC), initiative franco-néerlandaise sur les stocks de munitions). Les
moyens conventionnels jouent aujourd’hui un rôle stratégique propre et
ne sont plus considérés uniquement comme un apport à la force de
dissuasion nucléaire.
La prévention constitue la première étape de mise en
œuvre de la stratégie de défense. Elle doit permettre, par le
renseignement, de disposer d’une capacité d’anticipation et d’une
capacité autonome d’appréciation de la situation. La diplomatie de
défense française, à travers le développement des relations de défense
et de sécurité avec ses partenaires étrangers, qu’il s’agisse de
dialogue stratégique, d’échange d’informations, d’assistance ou de
coopération militaire, participe également de la prévention.
La projection et l’action ont structuré la conception du
modèle d’armée français. La capacité à envoyer des forces, aussi bien
en Europe qu’à l’extérieur du continent européen, et l’aptitude à
engager rapidement et à soutenir dans la durée des groupements de forces
interarmées, pouvant imposer rapidement une supériorité sur un théâtre
d’opération, en sont les clés.
La protection des personnes, des institutions et du
territoire est une exigence permanente, et la défense du territoire
national doit être assurée en toutes circonstances. Il s’agit d’être en
mesure, à tout moment, de s’opposer à l’exercice d’un chantage, de
représailles ou d’agressions contre le territoire ou les populations, ou
de limiter les conséquences d’une attaque asymétrique. Enfin, résultat
direct de la liberté de circulation des personnes et des biens dans
l’Union européenne (UE), la protection du territoire s’inscrit de plus
en plus pour la France dans le cadre d’une coopération renforcée avec
ses pays voisins et alliés.
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