Le parasite du paludisme échappe à la vigilance des cellules de défense dans le foie grâce à d'ingénieuses structures dans lesquelles il se dissimule pour pénétrer dans le sang et déclencher les symptômes de la maladie, ont découvert des chercheurs dont les travaux étaient publiés, la semaine dernière, dans la revue américaine Science.
Cette « stratégie du cheval de Troie » dont se sert le parasite, à l'origine d'au moins 500 millions de cas de paludisme et d'un million de décès par an dans le monde, a pu être mis en évidence grâce à l'imagerie in vivo permettant de le suivre, par fluorescence, en temps réel dans l'organisme de rongeurs, selon les chercheurs. Une stratégie absolument utile à Madagascar puisque toutes les régions sont concernées par cette maladie. Elle est la première cause de morbidité des femmes enceintes et des enfants moins de cinq ans. Selon le résultat des enquêtes effectuées en 2005, 95% du territoire malgache et 90% de la population sont exposés à la transmission permanente ou saisonnière du palu. De plus, quatre différentes espèces d’hématozoaires responsables du paludisme pouvant infecter l’homme sont répertoriées dans la grande île. La façon dont le parasite, transmis par piqûre de moustique, échappe au système immunitaire de l'organisme lors de cette étape cruciale, la sortie du foie, restait un mystère que l'équipe de Robert Ménard, chef de l'unité de Biologie et génétique du paludisme de l'Institut Pasteur, en collaboration avec des chercheurs de l'Institut de médecine tropicale Bernhard Nocht à Hambourg, vient de lever. La première étape du cycle de vie du parasite se situe dans le foie. Après la piqûre du moustique, le parasite (sous forme de « sporozoïte ») gagne cet organe par la circulation sanguine, et se différencie dans les cellules du foie pour prendre sa forme invasive, appelée « mérozoïte ». C'est cette forme du parasite qui envahira les globules rouges, à la suite de quoi apparaîtront les symptômes de la maladie. Les chercheurs ont observé que les cellules du foie infectées - chacune contenant quelque 10.000 mérozoïtes, la forme envahissante du parasite - se mettaient à bourgeonner pour former des structures constituant de véritables chevaux de Troie. Ces structures, nommées « mérosomes » par les chercheurs, bourrées de parasites, gagnent « incognito » la circulation sanguine en réussissant à échapper aux nombreuses cellules de défense, notamment aux macrophages/ éboueurs qui patrouillent dans le foie. Les parasites semblent capables à la fois de guider leur véhicule et de le dissimuler aux yeux des troupes de défense. L'enveloppe de ces structures/chevaux de Troie, fabriquée à partir de cellules de foie mortes, devrait normalement lancer un signal du type « manges-moi » aux nettoyeurs de la défense. Ce signal qui normalement conduit les macrophages/ éboueurs à engloutir toute cellule à éliminer, n'est plus émis, grâce à des modifications biochimiques induites par le parasite. Selon les chercheurs, la mise à jour de ces mécanismes offre de nouvelles cibles thérapeutiques, d'autant plus intéressantes qu'elles se situent avant le stade pathogène de l'action parasitaire (l'invasion des globules rouges). Pour Robert Ménard, l'imagerie in vivo « devrait permettre à l'avenir, pour le paludisme comme pour les maladies infectieuses en général, de mettre le doigt plus rapidement sur des cibles thérapeutiques nouvelles ».
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